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(roulement d'autobus)

(roulement d'autobus)

(conversations indistinctes)

(reniflement)

(reniflement)

(reniflement)

- Ariane, sois prête,

on va faire ça vite, parce que
sinon, ça finira jamais.

- OK.

(propos en espagnol)

- Gracias.

- Muchas gracias.

- Par ici.
- Feliz noche.

- Gracias. Buenas noches.

- Gracias.

(conversations indistinctes)

(conversations indistinctes)

- Je m'en fous,
de ce que je t'ai dit hier.

Appelle Gendron, dis-lui
de mettre un gars là-dessus.

Ben, débrouille-toi. OK, bye.

- Stéphane, je veux juste
te présenter Ariane.

Ça va être la coordo
pour les Guatémaltèques.

- Salut.
- OK, vous vous connaissez?

- Je connais bien son chum, Pat.
J'ai appris pour son procès.

Je suis vraiment désolé.
Comment il va, il s'en sort-tu?

- En fait, je sais pas, parce
qu'on n'est plus ensemble.

- Excuse-moi, je savais pas.
- C'est correct.

- Fait que tu t'es installée
dans le bout?

- Ben, je suis au village, chez
ma mère, sur le bord de l'eau.

- Ben oui, Nicole. C'est elle
qui t'a appelée, j'imagine?

- Oui, elle m'a dit
qu'elle parlait espagnol

et qu'elle vivait à 5 minutes
à pied de l'usine, fait que...

- As-tu déjà travaillé en usine?
- Pantoute.

Mais j'ai vu ma mère aller

et j'aidais Pat aussi
avec ses gars de construction.

- Ça va bien aller. C'est notre
1re fois aussi avec les Guats.

- Inquiète-toi pas. On va être
ensemble pour les trainings,

tu vas avoir le temps
d'apprendre. La job, là,

c'est de la traduction,
fait qu'à un moment donné,

si tu parles la langue,
n'importe quel cave

peut faire ça. Excuse-moi.

- Une question ici.
- Hé, ti-cul, tu dors pas?

Papa travaille.

- Qu'est-ce qu'il dit?
- Il demande c'est quoi "S.A.R."

- Les cotisations syndicales.
Syndicat Aliments de la Rive.

- Ils ont pas le droit
au syndicat

mais ils doivent payer
les cotisations pareil?

- Ouais, je sais.
C'est comme ça.

- Qu'est-ce qu'il dit?

- Il dit qu'il veut pas payer
les cotisations.

- Les cotisations?
- Les cotisations syndicales.

Il aura pas droit au service.

- Bonne chance pour faire
avaler ça à Babin.

- Il y a pas moyen d'amender
son contrat, quelque chose?

- Non, non, il faut payer
les cotisations, c'est la loi.

- Dis-lui que s'il veut pas
signer, personne va le forcer.

Y'en a un paquet
qui attendent après sa job.

(journal télévisé)

- Le premier ministre
Stephen Harper

a répété que son gouvernement
ira de l'avant...

- Maman... Laisse faire ça, là.

Ça vaut pas la peine.
Je repars dans pas long.

- T'es sûre?

On va quand même pas vivre
dans tes boîtes tout l'été!

- Je vais tout ranger ça,
tu ne les verras plus.

- Pis? Ça a-tu bien été?

- Je pense bien.
Mais tu m'avais pas dit

que c'était Stéphane Cournoyer,
le boss de l'usine.

- Tu le connais?
- Bien oui!

Il était dans la gang à Pat.

Ben oui, tu sais,
je l'avais stoolé

parce qu'il taxait
les filles à Martine.

- Ça me dit rien.
C'est-tu grave?

- Ben non.

C'est juste drôle de venir ici
pis que les petits bums

de l'école sont devenus
directeurs d'usine.

Je vais faire ça demain, OK?
Je suis fatiguée.

- Ouais.

Ariane?
- Hm?

- Pat a appelé de la prison.

Il a su ma façon de penser.

- Je veux pas lui parler.

- Je sais ben,
qu'est-ce que tu penses?

(battement de pluie)

(brouhaha)

(conversations indistinctes)

- Ariane, je compatis,
tu le sais,

mais la réalité, c'est qu'on
peut pas dire aux créanciers:

"Excusez, je suis
juste une victime".

Au moins, le condo
est à ton nom.

As-tu pensé à le vendre?

- Non. Je veux faire
une consolidation de dettes.

- La solution la plus simple,
ce serait de vendre ton condo.

Tu pourrais tout
rembourser d'un coup.

- Ouais, mais non, je veux pas.

- Tu pourrais le vendre plus
cher, ça te ferait un coussin.

- Le condo, c'est la seule chose
qui lui reste,

on peut-tu essayer de pas
perdre ça, au moins?

- Ariane, ça fait longtemps
qu'on se connaît.

Je vais te parler
dans le blanc des yeux.

Même en négociant
un super bon deal,

ça va te faire des gros
paiements mensuels.

Comment tu vas faire
pour payer ça?

- Ben, elle a une nouvelle job.
Vraiment payante.

- OK. C'est quoi, exactement,
ta nouvelle job?

(bourdonnement de machinerie)

(signal sonore de recul)

- Ariane!

Fait que...

le fuck avec l'éplucheuse, là,

c'est les pelures
pis les cheveux de maîs.

Ça colle, cette estie d'affaire-
là, ça bloque le drain.

On n'a pas le choix de mettre
une équipe pas mal full time

parce qu'il y a pas de machine
pour cleaner au fur et à mesure.

Sinon la cuve déborde pis
il faut arrêter la production.

(propos indistincts)

Vas-y.

Qu'est-ce qu'il a dit?

- Euh, il a dit, genre...

"Vas-y donc, toi,
avec ta jambe de bois."

- Es-tu ici pour niaiser
ou travailler?

Pas de temps à perdre, moi l.

Bon, ben, let's go!

Good job.

(stridulations d'insectes)

(bruits de vaisselle)

(battement de pluie)

(bruit de pas)

- Manuel Morales?

Viens, il y a des loads qui
viennent d'arriver last minute.

Overtime. Overtime. Ramirez!

Overtime.

(bourdonnement de machinerie)

(éclats de voix)

(propos indistincts)

Let's go, tout le monde!

(haut-le-coeur)

(brouhaha)

- Stéphane? Faudrait
qu'on se parle du surgelé.

Rien de grave, là, mais
on a un petit peu de retard.

- Crisse, donne-moi 2 minutes,
ça fait 3 heures

que je suis au téléphone
avec Ricard.

Tu manges pas, toi?
- Tantôt.

Il faut que j'envoie ça
au consulat avant 4.

- Estie de rush, hein.

Pis? T'es-tu ennuyée du village?

- Non. Ben, je me suis ennuyée
du bord de l'eau, c'est tout.

- As-tu revu tes chums,
Amélie et tout ça?

- Non. C'était plus
les amis à Pat, anyway.

- Estie de Pat. Méchante
bibitte, pareil.

Tu devais le savoir?

- Savoir quoi?

- Pat, ses magouilles, tout ça,
tu devais le savoir?

- Non, pourquoi tu dis ça?

- Come on, tu sais comment il
est, Pat. Tu devais t'en douter.

Prends pas ça
de même, là, on jase.

- Non, c'est juste que j'ai 24
rapports à finir, tu comprends?

(soupir)

(sonnerie de cellulaire)

(bruit de pas)

- Bon, accouche.

À 2h, je suis supposé avoir
fini, mon fils m'attend.

- Son père vient de mourir.

Il demande pour aller
chez lui 5 jours

pour aller aux funérailles.

- Ben, premièrement,
donne-lui nos sympathies.

Il peut y aller, mais
on pourra pas l'attendre.

Je peux pas faire venir un
remplaçant juste pour 5 jours.

- Il a vraiment
besoin de la job,

il s'est endetté pour venir ici.

- Je suis désolé. Je peux pas
l'aider plus que ça.

- S'il part juste deux jours
pour les funérailles et qu'il--

- C'est compliqué, là,
avec le rush de maîs.

- Oui, mais il y aura jamais
de bon moment, là.

- Check, on s'embarque pas
là-dedans.

J'ai pas envie
qu'il y ait de précédent.

- Stéphane, son père vient
de mourir! Tu peux pas demander

à un de tes temporaires
québécois de le remplacer?

- Y'en a pas, de Quebs qui
pellettent à 10$ de l'heure.

Pis je te jure, ça me fait
vraiment pas plaisir.

Mais si je dis oui,
je vais payer pour.

Là, excusez-moi,
mon gars m'attend.

(bouillonnement d'eau)

(bourdonnement de machinerie)

(bourdonnement de machinerie)

- Stéphane a du caractère, mais
les problèmes se rglent vite.

- Oui.

- Tu sais que, quand les
Français ont acheté l'usine,

le plan au début,
c'était de la fermer.

C'est Stéphane qui s'est battu.
C'est lui qui a eu l'idée

des Latinos. C'est à cause
de lui si on a de la job.

- Je savais pas.

- Pis Ricard arrête pas
de lui mettre de la pression.

Moi, je pense pas que
je ferais mieux que lui.

- Non, je dis pas ça,
c'est juste...

Il est rough.
- Hm.

Ben, si tu veux un conseil,

tu pourrais t'endurcir,
toi aussi.

Le Mexique, le Guatemala,
c'est pas la même réalité.

- Oui, excusez, est-ce que
vous pouvez lui demander

de choisir un NIP de 4 chiffres?

Encore une fois.

Oh, ça correspond pas.
Il y a une petite erreur.

Il faudrait recommencer.

Ça va?
- Oui.

- OK, parfait! Gracias!

- Gracias.

(ronflements)

(soupir)

(musique à la guitare)

(éclats de voix joyeux)

(cris joyeux)

(chanson en espagnol)

- ♪ Para iluminar
la oscuridad ♪

♪ Para contentar mi soledad

♪ En la fabrica de mis penas

♪ Nos construire
un futuro mejor ♪

♪ En la fabrica de mis penas
mi motor sera tu amor ♪

♪ Para derretir ese dolor

♪ De un invierno sin tu calor
Para iluminar la oscuridad ♪

♪ Sone que te di,
sone que te di ♪

♪ Tantos besos mas

♪ Sone que te di,
sone que te di ♪

♪ Tantos besos mas
Sone que te di ♪

♪ Sone que te di tantos
besos mas, sone que te di ♪

♪ Sone que te di...

(Ils arrêtent de chanter.)
- No, chicos!

Hé, come on, là!

(musique sur haut-parleur)

(chant religieux)

- ♪ Entre tus manos

♪ Confio mi ser

♪ Si el grano

♪ De trigo no muere

(soupir)

- C'est sûr qu'avec
les inondations,

ça nous a ralentis au début,
mais ça va se placer.

[soupir]

- [Bon, écoutez.]

[Je vais être honnte
avec vous.]

[On n'est pas très impressionnés
par les résultats]

[du dernier trimestre.]

- OK.

Écoutez, je sais pas trop
quoi vous dire, là.

- [On vous a fait confiance.
Vous nous avez demandé]

[de la main-d'oeuvre étrangère,
vous l'avez eue.]

[Qu'est-ce qu'ils foutent?
À 3% d'augmentation,]

[je suis désolé, mais on est
très, trs loin des objectifs.]

- Inquiétez-vous pas, M. Ricard,
je suis confiant.

- [Et qu'est-ce que c'est
que cette histoire]

[de laisser pourrir un
chargement de maîs au soleil?]

[J'ai jamais vu ça! On a 23
usines, ça n'arrive jamais!]

[Alors c'est quoi, votre
problème? De l'incompétence?]

- On fait du mieux qu'on peut.

- [Vous savez, c'est simple.
C'est le dernier avertissement,]

[je vous le dis. Soit
vous atteignez les 8%,]

[soit j'envoie quelqu'un
le faire à votre place.]

[Est-ce que c'est clair?]

[Est-ce que c'est clair?!]
- C'est compris.

On va prendre
les mesures nécessaires.

- [Bien. On se reparle
la semaine prochaine.]

- Merci, monsieur--
(Ricard raccroche.)

- Eh boy, il est
de bonne humeur!

Je l'engagerais
pour un shift de nuit!

- Il est en forme, là.
- C'est juste son style qui...

- Toujours aussi sympathique.
- Moi, je veux pas le voir ici.

- Peu importe ce que tu vas
faire, ce sera jamais assez.

C'est de même.
- C'est clair.

- Stéphane, on peut-tu en avoir
aussi, des petits jujubes?

Me semble que ça nous ferait
du bien, cet après-midi!

Oublier ça, ce téléphone-là.
- OK, les gars, je pense que...

(sonnerie de téléphone)
(propos entremêlés)

- Excusez-moi.

Excusez-moi.

Ça fait 13 fois en un mois qu'on
est obligés d'arrêter la prod

parce que le drain est bouché.
Peux-tu regarder ça

avec ta gang, s'il te plaît?
Va falloir les fouetter un peu.

- Pourtant, je les vois aller
pis ils font de l'overtime

à tous les jours,
ils rentrent de nuit--

- Check, là, c'est ma tête
qui est sur le billot.

Va falloir les pousser, sinon
je vais devoir les remplacer.

- Stéphane, on t'attend.
- Oui. C'est correct, j'arrive.

Tu fais de la maudite belle job
depuis un mois.

J'ai besoin de toi, moi.
Fais ce qu'il faut, OK?

- OK.

(soupir)

(bourdonnement de machinerie)

(grognement de douleur)

- No.

(bourdonnement de machinerie)

(propos indistincts)

(sifflement)

- Qu'est-ce que tu fais, là?
Tu les changes de poste?

- Je leur fais faire
des rotations.

- Ça te tentait pas
de m'en parler avant?

- Tu m'as dit "fais
ce qu'il faut", non?

- Je t'ai dit de leur parler,
pas de les changer de poste.

- Je voulais pas te déranger.
Inquiète-toi pas,

je les connais, les formations.
No big deal.

- Oui, big deal. S'il arrive de
quoi, c'est moi le responsable.

- OK, mais Stéphane, tu
comprends que ça sert à rien

de les faire pelleter de même
à la semaine longue--

- Hé, je sais c'est quoi, j'en
ai pelleté en estie, du maîs.

- OK, sauf que là, ça peut pas
aller plus vite que ça.

Les gars sont crevés.
- Ben, too bad.

Moi, j'appelle l'agence
et ils m'en shippent d'autres.

- Ben voyons donc, Stéphane!

Personne peut pelleter 50 heures
semaine sans s'épuiser!

- Ben oui, c'est une job de
marde, qu'est-ce que tu veux!

(bruit de porte)

Excuse-moi.

Regarde, t'as peut-être raison,

mais ça me dérange vraiment que
tu m'aies pas consulté avant.

- C'est beau, je comprends,
j'aurais dû t'en parler.

Je m'en occupe, OK? Ça prendra
pas une seconde de ton temps,

ce sera pas un stress de plus.
Ça te sert à rien,

de toute façon, d'avoir
des gars blessés, tu sais bien.

- Hm.

- Ils sont pas obligés
de faire de l'overtime.

Pourquoi ils disent pas non,
des fois?

- Ben, parce qu'ils connaissent
pas leurs droits.

Pis parce que depuis qu'ils sont
arrivés ici, on leur dit

qu'on peut les renvoyer
n'importe quand. Ils ont peur.

- Franchement, charrie pas.

On est au Québec,
c'est pas des esclaves!

- C'est pas ça que je dis, c'est
juste que s'ils goalent pas,

Stéphane va les renvoyer.

- Il bluffe. Il peut pas les
renvoyer, il a besoin de gars.

- Tu le connais pas, Stéphane.
Il niaise pas avec la puck.

(soupir)

- Ça se peut-tu que t'exagères
juste un peu?

Je sais que tu voudras pas
l'entendre,

mais je trouve que ça ressemble
à ton histoire avec Pat.

Tu t'endettes pour lui, pis là,
t'aides encore les autres.

Tu donnes, tu donnes.

Tu t'en rends pas compte,
mais tu fais profiter de toi.

Là, c'est toi qui es
dans le trouble.

Il faut que tu penses à toi.

- Ben oui.

Hé, merci, maman.

- Regarde, je dis ça
parce que je t'aime.

Ce serait de valeur que
tu perdes ta job pour ça.

C'est tout. Fais-en
ce que tu veux.

(bourdonnement de machinerie)

(sonnerie de cloche)

- Hola! Nos vemos manana.

(soupir)

No, gracias, chicos.

- (scandant): Ariana!
Ariana! Ariana!

- OK! OK, OK, OK!

(rires et conversations)

(rires)

Wow! Ay!

(chanson en espagnol
accompagnée à la guitare)

- Gros party icitte à soir!

- Oui, c'est la fête nationale.

- Parce que là, y'a un voisin
qui s'est plaint du bruit.

Il est presque 1h, Ariane,
faudrait pas que la SQ débarque.

- C'est beau, je m'en occupe.
Merci, Mathieu.

(chanson en espagnol)

- Wô, w, wô. OK,
dis-lui d'arrêter.

Recule. C'est beau. C'est beau.

Va te coucher.

OK.

C'est quoi son nom, à lui?

- Euh... Enrique, je pense.

Je sais pas, là,
ils sont toute une gang.

- C'est sûr que c'est mêlant,
presque tous la même face.

- Oui.
- Vous ramasserez ça demain.

Anyway, bye.
- Merci, Mathieu.

(exclamation de douleur)

(coups à la porte)

(grognement de douleur)

(coups à la porte)

(conversations indistinctes)

- Tu la veux où?
- Mets-la à côté des escaliers.

- Je fais juste poser
la question.

- C'est quoi, là? T'es rendue
représentante syndicale?

- Je leur dis quoi? Pourquoi
y'a des caméras tout d'un coup?

- Tu le sais, ça boit comme des
trous et ça dérange les voisins.

Si Ricard apprend ça,
moi, je suis mort.

- Oui, mais c'est pas illégal
de les surveiller?

- Pardon?
- Ils ont payé pour leur loyer.

Ils sont chez eux, non? On a
vraiment le droit de faire ça?

- Je veux plus que tu te mêles
de ça, c'est-tu clair?

- Je fais juste poser la ques--
- Ariane, je niaise pas, là.

T'es trop sensible pour
travailler icitte, toi.

- C'est-tu illégal ou non?

- Qu'est-ce que tu faisais à
boire avec eux à la résidence?

Tu le sais que c'est
contre le règlement.

J'ai ben de la pitié pour
ta situation, mais guess what,

moi avec, j'en ai, des dettes.
Pis là, tu joues avec ma job.

- Je m'en câlisse.

(bourdonnement de machinerie)

(grognement de douleur)

(cri de douleur)

(brouhaha)

(bourdonnement de machinerie)

- Stéphane!

Stéphane! Fuck.

- Lui, celui-là, pis
c'est lequel, l'autre?

- C'est lui, je pense.
- Ces deux-là, tu me les sors.

- C'est quoi qui se passe, là?
- Dis-leur qu'ils se rhabillent.

- Jean-Pierre, il va falloir
un transport à l'aéroport.

- Peux-tu me dire
c'est quoi qui se passe?

(brouhaha)

OK, fait que
vous les mettez dehors?

- Tolérance zéro, c'est écrit
dans les règlements.

- Ils se sont même pas
battus sur la job.

- OK, let's go, man.

- Let's go. Get out.

Ramasse tes Guats,
faut que je leur parle.

Toi, appelle l'agence.
Il va m'en falloir deux autres.

- Stéphane, on peut-tu parler
juste deux secondes--

- Ariane, calme-toi.

Ça sert à rien que tu perdes
ta job pour ça.

- Traduis.

Dis-leur que c'est fini,
les rotations de poste.

C'est mon erreur,
j'aurais pas dû t'écouter.

- Quoi?

Voyons, là! Ben non! Pourquoi?

- On l'a essayée, ta façon. Elle
m'a juste causé des problèmes.

S'ils peuvent pas suivre,
on les remplace, that's it.

- Non, il en est pas question,
je suis désolée! Si tu fais ça,

j'appelle Ricard pis je lui dis
comment tu traites les gars.

- Tu penses qu'il le sait pas?

Je te le dis, Ariane, si tu veux
jouer à ça, tu gagneras pas.

Je te le redemande.

Traduis.

Traduis, sinon je kill
tes petits amis drette là.

Ah, pis ça va faire.
Sors-moi ces trois-là.

- Les trois icitte?
- Non! Non!

OK! Arrête!

C'est beau.

- Pas si compliqué,
finalement, hein?

- Qu'est-ce qu'il y a encore?

Tu vas me dire que je fais
profiter de moi, c'est ça?

- Ariane, j'ai été 35 ans
dans les ressources humaines.

J'ai jamais vu ça.

- OK, fait que qu'est-ce
que je fais, moi?

Aide-moi donc, maman.

- As-tu parlé à l'agence
de placement?

Ils peuvent pas t'aider?

- Ils chargent des frais
supplémentaires

à chaque nouveau recrutement.

Ça fait bien leur affaire
qu'il y ait du roulement.

- Bien, tu pourrais...

appeler la TV, écrire
là-dessus, peut-être.

- Ben non! Je peux pas
parler de ça publiquement.

Sinon, je viole mon contrat
pis je me fais poursuivre.

- Mais sans syndicat,
avec la vidéo,

y'a pas grand-chose
à faire pour eux autres.

Mais...

Y'a peut-être
quelque chose à faire

pour celui qui a mal au dos.

- Agachate.

- No puedo mas.

- C'est le plus
qu'il peut aller.

- OK. Il peut s'asseoir?
- Sientate.

- Ça a bien l'air
d'une entorse lombaire.

Là, je vais le mettre en arrêt
de travail pour une semaine.

J'ai prescrit un relaxant
musculaire.

Il faut qu'il en prenne une fois
par jour, en mangeant. OK?

Il peut prendre de l'ibuprofène
aussi, au besoin.

Mais là, l'important,
c'est du repos.

Don't move. No bouger.

- OK, c'est bon.
- Ça va bien aller.

- Merci.

- C'est ta mère qui t'a dit
de l'envoyer là?

- Check, c'est fait, pis vous
allez lui donner un break, OK?

- Tu savais qu'on avait
un médecin attitré.

Écoute, je sais que t'as voulu
bien faire, mais tu viens

de nous compliquer la vie
en mettant la CSST là-dedans.

- Excusez-moi, je veux pas
vous déranger. Ils sont arrivés.

- C'est beau, on s'en occupe.

- Tu te rends compte que t'es
encore en train de me faire

perdre un gars? Il va falloir
que je le paye, en plus!

- Mais arrête de les renvoyer--
- Arrête de me parler comme ça!

- OK, moi, je peux plus!
Je veux pas être complice de ça!

C'est dégueulasse, la façon
dont tu les traites.

- Tout le monde vous regarde.
- Tu veux pas être complice?

Donne-moi ta passe.

Donne-moi ta passe! Je t'ai
laissé assez de chances, là.

- Je sais que tu peux pas
me clairer de même, là.

- Je te claire pas,
c'est toi qui démissionnes.

Tu dis que t'es plus capable,
fait que donne-moi ta passe.

- Stéphane, on va se calmer--
- Ta yeule, Michèle.

Donne-moi ta passe.

- Crisse, t'es-tu ben quand tu
me parles de même? Es-tu fier--

- DONNE-MOI TA CRISSE DE PASSE!

- Y'a une pile de rapports
à traduire avant le 4.

Juste de la traduction, là.

N'importe quel cave
pourrait faire ça.

Câline, je sais même pas
pourquoi je pleure, ostie.

Je suis tellement
en tabarnak, là!

- Je vais appeler Robin,
je vais lui expliquer, moi.

C'est sûr que le syndicat
va te backer.

Avant la fin de la journée,
tu vas la ravoir, ta job.

- Non, non, maman, pour vrai,
ça vaut pas la peine.

- Ben voyons!
Il en est pas question!

- Non, quand je vais là,
je me sens comme de la marde!

- Ariane, tu vas faire quoi,
pas de job?

T'as tout fait ça pour rien?
C'est fini?

C'est pas juste! C'est toi
la victime là-dedans!

- Ah, maman, s'il te plaît,
dis pas ça!

- Mais Ariane, c'est vrai!

Peux-tu penser à toi
avant les autres

rien qu'une fois dans ta vie?

Penses-tu vraiment que je savais
pas que Pat fraudait?

- Quoi?

- Je sais pas comment
il faisait, mais...

Mettons que je m'en doutais
en sacrament.

Il faisait de l'argent
comme de l'eau, il travaillait

presque pas, je veux dire...
Pas folle, la fille, là.

Mais moi, j'ai rien dit pis j'en
ai juste profité, fait que...

Viens pas me dire
que je pense pas à moi.

- Pourquoi tu me l'as pas dit?

- Parce que je...

J'avais peur que tu m'aides pas.

Tu sais...

Je pourrais faire comme si
de rien n'était à l'usine,

comme j'ai fait avec Pat,
mais...

Check où ça m'a menée.

- Super.

- Ça, c'est tes meilleurs amis.

(aboiements au loin)

- Ce serait pas possible
de reporter les paiements?

- Non. On est déjà chanceux
que les créanciers

aient accepté l'entente.
Je peux plus rien faire.

- C'est quoi, un mois de plus?
- C'est déjà une concession.

Ils voudront rien savoir,
ça va finir en poursuite.

Ariane, est-ce que tu comprends?
- Oui, je comprends.

- T'as pas l'air là.
Qu'est-ce que tu comprends?

- Ben, que j'ai deux semaines
pour me trouver une autre job

sinon il faut
que je vende le condo.

(coups à la porte)

(coups à la porte)

(coups à la porte)

Je demande.

Désolée. Désolée.

- [Est-ce que vous le voyez, là?
Êtes-vous rendue?]

- Oui, j'y arrive.

- Que pasa? Que pasa?

- Désolée. Manuel?

Il respire, en tout cas.

Oui, je vais rester avec vous.

Câlisse.
(gémissement)

- Manuel?

- Manuel? Manuel!

Manuel! Estas bien?
Que te pasa, Manuel?

(exclamations)

(sirène)

- Ici 694 pour la centrale.
Ça va me prendre un 10-10

pour l'hôpital des Patriotes.

- Je pense qu'il va
vomir encore, là!

- Monsieur, prenez ça.
- C'est beau, je vais le tenir.

- Non, c'est bon que ce soit
lui, ça va le garder conscient.

(vomissement)

- Sacrament de crisse
de câlisse!

(cris de douleur)
- Attention!

Attention!

- Dites qu'on est arrivés,
s'il vous plaît. Attention.

- Attention.

- Est-ce qu'il est hypotendu?
- Pas mal.

- Est-ce que vous pensez que--
- On va venir vous chercher.

- Suivez-moi,
ça va être ici, à gauche.

L'ascenseur, s'il vous plaît.

(halètements)

Madame? Madame!
Vous parlez espagnol?

On a besoin de vous maintenant.
Suivez-moi. Go!

- Excusez! Excusez!

- Ça va?
- Oui.

- OK, par là.

Donnez-moi vos choses.

Lavez-vous les mains ici.

On va lui faire une gastroscopie
d'urgence, OK?

On va avoir besoin de vous
pour s'assurer qu'il collabore.

Dites oui si vous comprenez.
- Oui, oui, je comprends.

- Mettez ça.

- Venez vous asseoir ici.
Dépêchez-vous.

On va lui mettre un tube dans la
gorge pour aller voir l'estomac.

Ça va être important qu'il reste
calme. Il faut qu'il collabore.

Il faut pas qu'il se débatte.
- Vous allez pas l'endormir?

- Il a perdu trop de sang. S'il
perd connaissance, on pourrait

le perdre. Parlez-lui,
il faut le garder conscient.

OK, on y va!

- Pression à 94 sur 59.

- OK, Véronique,
je suis prêt de mon côté.

- Ouvrez la bouche.
- Il va vomir, il va vomir!

- Je suis là!

- OK, on y retourne. Il faut pas
qu'il vomisse, dites-lui.

- Ouvrez la bouche.

(gémissement)

On lâche pas. Ça va aller.

On va y arriver.
- Pas le choix, faut y aller.

On recommence.
- Attention, madame.

Je vais juste vous demander
de reculer un peu. Merci.

- Ça va bien, madame,
continuez de lui parler.

OK. OK, on est là.

Faut qu'il arrête de bouger,
je pourrais empirer sa blessure.

- Lâchez pas, madame.
- Oui, c'est ça que je fais!

- Vous faites bien ça.
Ça va aller.

- Shh, shh, shh.
Mirame en los ojos.

(indistinct)

(musique dramatique)

Shh...

Shh... Shh...

(bourdonnement aigu)

- (assourdi): Madame?

Madame?

(coups sur la table)

Ça fait un total de 43 825,95.

Quel mode de paiement?

- Attendez,
vous avez dit combien?

- 43 825,95.

- Écoutez, c'est parce que c'est
pas moi qui vais payer ça.

Je... je travaille même plus là.

- Ah? Vous avez les coordonnées
d'une autre personne?

- Madame? Je peux vous parler
deux minutes?

- Je peux y aller?
- Oui, oui.

- Pour l'instant, il n'y a pas
de signe d'infection. Écoutez,

j'ai jamais vu une aussi grosse
blessure à l'estomac.

Son médecin lui a prescrit
du cyclobenzopram

pour son entorse?
Il suivait sa posologie?

- À ma connaissance, oui.

- Est-ce qu'il prenait
autre chose? Acétaminophène?

Ibuprofène?
- Je sais pas.

Peut-être.
(soupir)

- En tout cas, une chose est
sûre, pour en arriver là,

il a dû souffrir
pendant des semaines.

(vomissement)

- Peux-tu lui dire de prendre
une grande respiration?

Bon.

Tu peux lui dire
de se rhabiller.

- Merci, tu me sauves la vie.
- Pas de trouble.

J'ai bien fait
d'être venu aussi vite.

- Oui, bonjour,
c'est Ariane Bélanger.

J'ai une entrevue d'embauche
avec vous ce lundi.

Oui, exact. En fait,

j'appelle parce que j'ai
un petit contretemps,

alors je me demandais si c'était
possible de repousser

notre rendez-vous en après-midi.

Oui, je comprends.

OK, et est-ce que
vous pensez faire

une deuxième journée
d'entrevues?

- Va falloir faire une demande
de révision administrative.

Vous allez remplir un nouveau
formulaire de réclamation.

Tu l'envoies pas avant
de me l'avoir montré.

C'est bien important
de choisir les bons mots,

parce que si ça va en cour,
ça peut se retourner contre lui.

As-tu tous les horaires
de Manuel?

- Ben, j'ai ceux que j'ai faits
avant de me faire renvoyer.

- Tu demanderas à Manuel
de t'envoyer ceux qu'il manque.

Après ça, il va falloir
que tu ailles à l'hôpital.

Tu vas demander toutes les notes
des deux médecins.

- J'en reviens pas, câline,
qu'il lui ait fait signer

une fausse déclaration. Je veux
dire, à quoi ça lui sert?

- À pas faire augmenter
leurs cotisations d'assurances.

Comment ils appellent ça, déjà,
le poste où ils pellettent?

Journalier?
- Non. Auxiliaire.

Check.

Ici.

- Ah, OK.

Calvaire!
- Quoi?

- 29 jours en ligne à pelleter.

Il a pris juste
deux dimanches off.

(soupir)

(bourdonnement de machinerie)

(coups à la porte)

- T'as de la visite.

- Qu'est-ce qu'elle crisse
icitte, elle?

- T'avais pas averti? Montre-lui
ce que tu m'as montré.

- Ça, c'est une procuration
légale. À partir de maintenant,

si vous voulez parler à Manuel,
c'est par moi que ça passe.

- Voyons donc, câlisse!
T'es rendue avocate, là?

- Je pense que tu peux y aller.
On n'aura plus besoin de toi.

- OK.

- Vous me le dites
si je vais trop vite.

- Non, ça va, continuez.

- 18 septembre: Manuel Morales
est en arrêt de travail

pour 7 jours,
sauf que le 22 septembre,

moi je ne suis plus là, mais
selon Manuel, Stéphane est allé

le voir pour lui demander
de recommencer à pelleter.

- Voyons donc, c'est pas ça
qu'il dit dans sa déclaration.

- [De toute façon, je m'excuse
de vous interrompre,]

[M. Cournoyer, on reconnaît
que l'entorse lombaire]

[est une lésion professionnelle,
pas besoin de revenir dessus.]

[Ce qui est problématique,
c'est la blessure à l'estomac.]

- C'est ça, il a pas suivi
la posologie. C'est ben plate,

je veux pas l'insulter, mais
c'est son erreur à lui, ça.

- Manuel?

Quand ils sont allés voir
Manuel, ils lui ont donné

des pilules,
pas de posologie, rien.

Ils ont juste dit que ça allait
enlever la douleur,

pis qu'avec ça, il pouvait
recommencer à pelleter.

- N'importe quoi. Je sais pas si
tu veux te venger pour ta job,

mais estie que t'as le don de
nous faire perdre notre temps.

- [M. Cournoyer, arrêtez de
l'interrompre, s'il vous plaît.]

[Mme Bélanger parle
au nom de votre employé.]

[Il a le droit d'être
entendu, lui aussi.]

- C'est beau, je peux continuer?
- [Oui, allez-y.]

- C'est un anti-inflammatoire
en vente libre,

mais c'est aussi
un irritant gastrique.

- [OK, donc?]

- Ce qui se passe, c'est que
Manuel continue de pelleter

8 jours en ligne. Il a mal,
il est souffrant, il est confus

et il sait pas à qui parler,
alors il se gave de pilules

et il combine ça
avec sa prescription.

Jour 9, il est à l'hôpital
avec un trou dans l'estomac.

Là, on blâme personne, OK?

C'est juste que vous savez
comme moi qu'il pourra pas payer

les frais médicaux.

Nous, ce qu'on demande, c'est
une réclamation administrative--

- [Non, une révision.
Révision administrative, oui.]

- Merci. Une révision
administrative

pour que la blessure à l'estomac

soit reconnue comme une lésion
professionnelle.

- [OK.]

- La moindre des choses, là,
ce serait de pas l'endetter.

- [OK, mais est-ce que M.
Morales peut nous expliquer]

[pourquoi il a dit qu'il se
sentait apte à travailler]

[dans sa déclaration?]

- Oui, le problème,
c'est que c'est pas lui

qui a rempli la déclaration.

- [Est-ce que vous pourriez lui
poser la question directement,]

[qu'on l'entende de sa bouche,
s'il vous plaît?]

- Il sait pas c'est quoi qu'il a
signé parce qu'il sait pas lire.

- [C'est des allégations
graves, ça là.]

[Pour moi, ça justifie
de demander une enquête.]

- Dites-moi pas
que vous la croyez?

- [Ben... c'est votre parole
contre la sienne, M. Cournoyer.]

- C'est sa christie
de déclaration!

Pensez-vous qu'on l'aurait forcé
à signer? Voyons donc, câlisse!

- [M. Cournoyer, exagérez pas.]

[Votre employé est parfaitement
dans son droit. Vous allez pas]

[gagner ma sympathie
en me parlant comme ça.]

[Bon, là, je vais procéder
avec la demande de révision.]

[M. Morales, si vous voulez
demander une enquête,]

[c'est votre droit.]

- Il veut pas faire de plainte,
il veut juste que ça se règle.

- [OK.]

[Bon, j'ai bien reçu la demande,
je l'ai annotée.]

[Je vous avise qu'il y a à peu
près un délai de deux semaines]

[pour la réévaluation.
Je vais vous tenir au courant.]

(propos indistincts)

- Bon, de la grande visite!

Tu nous as fait un beau show
de boucane avec la CSST!

- C'est beau, je m'en occupe.

Qu'est-ce que tu viens
faire ici?

- Come on, Michèle,
je viens juste leur dire bye.

- Ouais. À quoi t'as pensé?

Tu sais que,
s'ils font une enquête,

on va tous perdre notre job.

- Fait qu'asteure, vous savez
comment ils se sentent.

- OK, tout le monde, c'est
l'heure! On va y aller!

- Vamos, chicos!

Rapido, por favor!

- ♪ En la fabrica de mis penas
nos construire un futuro ♪

♪ En la fabrica de mis penas
mi motor sera tu amor ♪

♪ Para derretir ese dolor

♪ De un un invierno
sin tu calor ♪

♪ Para iluminar la oscuridad

♪ Para contentar mi soledad

♪ Sone que te di,
sone que te di ♪

♪ Tantos besos mas

♪ Sone que te di,
sone que te di ♪

♪ Tantos besos mas

♪ Sone que te di,
sone que te di ♪

♪ Tantos besos mas,
tantos besos mas ♪

♪ Yo sé que hay nada
que calienta mas ♪

♪ Que las ondas de tu sol

- Qu'est-ce qui se passe?
Qu'est-ce qu'il y a? Ça va pas?

- Ariana! Ariana!

(coup de klaxon)

(musique dramatique douce)

(crépitement de feu)

(musique à la guitare)

(Le groupe de travailleurs
chantePuro Chapin.)

(rires et cris de joie)

(La chanson reprend.)

(rires et cris de joie)

(La chanson reprend.)