All language subtitles for Jeanne Du Barry La Favorita Del Re (2023) 1080p_fr

Musique calme

-Jeanne Vaubernier
était la fille illégitime

d'un moine et d'une cuisinière.

Sa destinée était de vivre
dans l'obscurité du petit peuple,

la plèbe, la roture.

Autant dire qu'elle était fille de rien.

Mais les filles de rien
ne sont-elles pas prêtes à tout ?

Mélodie douce au violoncelle

- -

Sa mère, Anne,

l'élevait seule depuis sa naissance.

Elle officiait comme domestique
chez M. Dumousseaux,

qui était un homme
charitable et bienveillant.

Pris d'affection pour la fillette,
il assuma son éducation,

ayant à cœur
d'étancher sa soif de savoir

et de policer ses manières
par la fréquentation de son salon.

-Intelligence.

-Entendement.
-Oui.

-Réflexion.
-Oui.

-Pensée.

-Euh… raison !

-Oui.
-Esprit.

-Jugement.

-Connivence.

-Compréhension.

-Discernement.

-Bravo, Jeanne !

Musique classique douce

- -

-Grâce à Monsieur Dumousseaux,
qui s'acquitta des frais,

Jeanne fut envoyée
au couvent de Sainte-Aure.

Sans doute espérait-il par là
lui éviter l'avenir de débauche

qui attend trop souvent
les filles du peuple.

-Venez, Jeanne.

Musique dramatique

- -

-Jeanne grandissait,

et l'univers du couvent
devenait trop étriqué pour elle.

Mais les livres étaient là
pour lui ouvrir le monde,

et elle ne tarda pas à y découvrir
le pouvoir troublant de l'érotisme.

-Jeanne !

Fille de Satan !

Je t'apprendrai à lire ces livres !

Baisse les yeux !

-Oui ?

Musique classique douce

-À son renvoi du couvent,
Jeanne n'était plus une enfant.

Redoutant que son époux

ne puisse résister longtemps
à la tentation,

Mme Dumousseaux
congédia Jeanne et sa mère

sous le prétexte d'un vol
qu'elle n'avait pas commis.

Mais à quoi bon être innocente

si les autres
ont pour vous des désirs coupables ?

- -

Les deux jeunes femmes
décidèrent de se diriger vers Paris,

capitale de tous les espoirs
et de tous les dangers.

- -

(-Ça va durer des heures ?)

(Déshabille-toi.)

-Non.

- -

(-Allez, viens.)

- -

(Jeanne !)

Je t'en supplie !

Déshabille-toi.

- -

Tu le fais tout le temps, d'habitude.

-C'est mon corps.

-Si vous nous laissiez seuls ?
-Pardon ?

-Faites un tour dans le jardin.
Il est splendide.

- -

-"Une certaine espèce de courtisan…”

-Peu après,
Jeanne fut engagée comme lectrice

chez Mme de La Garde,

une veuve qui vivait seule
avec ses deux fils.

Cette dame lui fit découvrir
la grande littérature,

et Jeanne se retrouva

à rivaliser d'esprit
avec la fine fleur de l'aristocratie.

(-Insolent.)

-Insolent !

-Ehonté.

-Impertinent.

-Qui dit mieux ?

-Hardi.
-Hm.

-Audacieux.
-Oui.

-Mal élevé.
-À vous, Jeanne.

-Culotté.

-Après tout ce que j'ai fait pour vous,

je vous trouve dans le lit
de mes fils ! Dehors, catin !

Quelle honte !
Non, mais quelle honte !

- -

-Grâce au libertinage, Jeanne
avait découvert une façon d'être femme

qui était une façon d'être libre.

- -

Les années passèrent,

et Jeanne apprit
à user de son charme

pour séduire des amants
de plus en plus fortunés

et gagna rapidement
ses galons de courtisane.

- -

- -

-Et voici, dans son nuage
de satin rose, Adélaïde.

Musique douce

Regardez
sous cette crêpe de dentelle noire,

un corset blanc

d'une douceur "angeline"…

adolescente.

-Ah, Du Barry !

-Mon cher, comment allez-vous ?
-Bien.

-Monsieur Du Barry !

Monsieur Du Barry !

-Mademoiselle… enchanté.

-Quelle joie de vous revoir !

-C'est un plaisir pour moi.
Comment vas-tu, ma belle ?

-Jeanne.

-Jean.

Un ange tombé du ciel.

Mme Labille m'a beaucoup parlé de vous.

Je dois avouer
qu'elle ne m'a point menti.

Où étiez-vous tout ce temps ?

Je vous attendais, moi.

-Ah.…

Vous n'avez peur de rien.

-Je vous fais rire, déjà.

Vous ne me croyez pas.
-Non.

-Qu'est-ce que je peux faire
pour vous convaincre ?

Je pourrais vous proposer un logement.

-C'est ma mère qui s'occupe des marchés.

-Je n'ai absolument rien
contre votre mère,

mais là…

c'est de ma vie dont il s'agit.

-De la mienne aussi.

-Partageons-la.

-Alors ?
-Entendu.

-Bien.

J'aime mieux ça.
-Marché conclu.

Musique épique

-Bravo !

-Monsieur Du Barry...

malgré tout le respect
que je vous porte…

Si, si !

Je vous aime bien, comte.
C'est le duc qui vous le dit.

-Moi aussi.

Je vous écoute.

-Vous avez remarqué qu'on amène
des femmes dans le lit du roi.

-J'ai remarqué.

-Et aucune ne retient son attention.

-Absolument.
-Bien. Alors, maintenant…

Il faut que le roi rencontre Jeanne.

-Comme ça, par hasard, vous voyez ?
-Hm ?

-Vous voulez miser sur le hasard ?

-Voilà. Le hasard.

Il croira qu'il l'aura choisie lui-même.

-Tiens, justement, la voici.

Qu'est-ce que tu faisais, chérie ?
Je t'attendais.

-J'aidais Adolphe
à finir sa dissertation.

-Je paie des gens pour ça.

-Il y a des choses
qui ne s'achètent pas, Du Barry.

-"Du Barry" ?
-Oui.

Qui est là ce soir ?
-Comme d'habitude. Des écrivains,

des poètes,
le maréchal de Richelieu.

Viens, j'ai besoin de toi.

Et aussi

quelques courtisanes de haut vol.
Mlle Legrand

et la comtesse de La Rena.

-T'as pas pu t'empêcher.

-On parle de tes amants ?

-Ils participent
aux frais de notre foyer.

Tes maîtresses ne ramènent pas un écu.

C'était ça, le marché.

-Et tu pourrais avoir l'élégance

de ne pas les exposer.

-Richelieu aimerait
te présenter au roi.

-Le roi, t'as que ce mot à la bouche.

-Je te retiens pas, tu es libre.

-C'est pour ton fils que je reste.

-Jeanne, ma chérie.

Je t'aime.

Hein ?

Pas comme tu aimerais, mais je t'aime.

-C'est pas ça, l'amour.
-Ah oui ? Alors, c'est quoi ?

Hein, madame Je-sais-tout ?

-Je sais peut-être pas ce que c'est,

mais je sais que c'est pas ça.

Bonsoir.

-Bonsoir.

-Bonsoir.

-Voilà l'élue de mon cœur.

-Adolphe ?

-Délicieux, ce vin.

-Très bon.

-Bonne soirée, messieurs.
-Bonne soirée.

-Galette du roi.

Je sais que c'est l'un
de vos gâteaux préférés.

-Hm…

-Que se passe-t-il ?

Quelque chose dans la bouche.

-Sans vouloir être coquin,
je crois que cela arrive souvent.

-Raffiné.
-Plein la bouche.

-Il a un joli visage, le roi.

-Qu'est-ce que tu fais encore là ?

-Tu m'as dit
qu'il fallait que je me repose.

-Eh oui, tu as raison.

C'est très important de se reposer.

Je n'aime pas que tu annules
des galanteries sans m'en parler.

Je te parle.

Pourquoi tu t'acharnes à lire autant ?

Hein ? Tu te reposes, là ?

Vas-y, repose-toi !

Repose-toi !

Hein ?

Tu es et tu resteras

toute ta vie une putain ignorante.

-Il n'y a que vous
que j'accepte de voir le matin.

Les autres,
je les vois l'après-midi.

-Attention, un mensonge bien fait
est une déclaration d'amour.

Ne serait-il pas temps
de changer de vie ?

-Pour aller où ?

Et avec qui ?

Je n'arrive pas à quitter son fils.

Adolphe.

-Jean du Barry
veut que je vous présente au roi.

-Je sais,
il m'en parle jour et nuit.

-Jeanne…

Quelle vie désirez-vous ?

-Hm….

Une vie pleine de curiosités.

Une vie où l'on prendrait
le temps de vivre,

boire, manger, écrire, lire.

Les gens comme moi,
nous n'avons jamais le temps.

Ma mère est cuisinière.

Alors, soit je fais comme elle,

soit je fais de la galanterie.

Honnêtement, je préfère la galanterie.

-Tournez-vous.

Musique dramatique

-Le roi !

-Pour mon frère, condamné à mort.

-Sire…

-"On verra la définition…"
-Y a un point.

-Pardon. "Le féodal."

-"Et" le féodal.
-Et le féodal.

-Madame ?

Monsieur.
-Monsieur.

-Sa Majesté le roi
aimerait revoir Madame.

-Très bien. Quand cela ?

-Maintenant.

S'il est possible à Madame.

-Elle sera prête dans une heure.
-Non, je suis prête.

-Comment ça ?

-Je suis prête.

-Mais non, enfin.
Tu peux pas y aller comme ça.

Change de robe.
Au moins les cheveux !

Mais Anne ! Dites-lui.
-Il a raison, change de robe.

Sois gracieuse.
Comme tu sais l'être.

Tu as tout le reste.

N'aie pas peur.
-J'ai pas peur.

Qu'est-ce que c'est ?

-C'est l'usage.
Personne ne doit vous voir.

Musique douce

- -

-Jeanne ?

- -

Tu reviens quand ?
-Je reviens vite.

- -

-Avez-vous connu
de nombreux partenaires ?

-Qu'entendez-vous par "nombreux" ?

-Plus d'un partenaire.

-Un à la fois, oui.

La plupart du temps.

Rencontrez-vous en ce moment
le genre de désagréments

qui affectent la matrice des femmes ?

(-Psst. Je comprends pas ce qu'il dit.)

-Est-ce que cela vous démange ?

-Non, non. Vous savez…

Chaque jour, j'abreuve mon…

creux d'amour d'huiles précieuses.

-Ressentez-vous des brûlures
lors de la miction ?

-Psst.
-Lorsque vous pissez.

-Non.
-Je crains, Madame,

qu'il faille aller plus loin
dans l'examen.

-Oui.

-S'il vous plaît.
-Ah oui.

-Veuillez écarter les jambes.

Un peu plus, Madame.

Voilà.

Je déclare Madame
digne de la couche royale.

-Bien.

Monsieur.

-Je préconiserai quand même
une quarantaine

au cas où des maladies
vénériennes apparaîtraient.

-Merci, nous allons en rester là.

-Et maintenant ?
Vous allez me goûter, c'est ça ?

-Non.
-Non ?

Tout le monde dit
que vous goûtez les femmes.

-Il me faut vous enseigner
quelques usages.

-Bien.

Vous parlez toujours comme ça ?
-"Comme ça" ?

-Oui, avec cette manière supérieure.

-Mais vous êtes à Versailles, Madame.

-Je serai incapable
de m'adresser au roi comme ça.

-Le roi ne vous a pas fait venir
pour vous entendre parler.

-Alors, allez-y.

Apprenez-moi les usages de Versailles.

-Puis-je voir la révérence
que vous ferez au roi

ce soir, Madame ?

Les bras légèrement plus hauts.

C'est parfait.

-Est-ce que je dois
le toucher la première ?

-Laissez-vous faire.

-Mais…

Est-il difficile à satisfaire ?

-Non, il est ardent.

Vous n'aurez pas besoin
de mille stratagèmes

pour éveiller ses sens.

-Mais…

Dois-je dire quelque chose de spécial ?

-Votre fébrilité parlera pour vous.

La seule chose
que vous devez retenir, Madame,

c'est qu'il ne faut jamais
tourner le dos au roi.

Si le roi se trouve devant vous,

et que vous voulez vous retourner,
vous devez faire ceci.

-C'est une plaisanterie ?

-Absolument pas.

Aucune personne
ne peut tourner le dos au roi.

Sauf le Dauphin.

Vous m'entendez ?
-Oui.

Mais qu'est-ce qui se passe
si je ne fais pas ces petits pas ?

-Sa Majesté verra
que vous n'avez aucune grâce.

-Et ?

-Et elle est très sensible à la grâce.

-Ah, moi aussi.

-Quelque chose vous amuse, Madame ?

-Je souris parce que vous ressemblez
à un écu de 6 francs.

-Ah.

-Je suis très honorée, Majesté.

Oups.

-Euh…

Vin de champagne ?

-Je peux ?

-Oui.

(-Oh mon Dieu.)

Hmm…

-Vous aimez ?

-Hm…. Non.

C'est de l'or massif ?
-Oui.

-Votre nom est gravé
sur chaque couvert ?

-Ah, il me semble.

Donc c'est l'or qui vous intéresse ?

Hein ?
-Hm…

-Regardez derrière vous.

Là.

La statue.

-Oui ? C'est de l'or aussi ?

Ooh….

(Pardon, Majesté.)

Je suis désolée,
je ne vais pas y arriver.

-À quoi donc ?

-À faire ces petits pas à reculons.

Je suis désolée,
je vais pas y arriver.

-Vous êtes de quel signe ?

-Je ne sais pas.

Je n'accorde pas
beaucoup d'importance à l'astrologie.

-Hm.
-Votre Majesté.

Alors, vous me permettez ?

-De ?

-De ne pas faire
ces petits pas à reculons ?

Merci, Majesté.

Musique douce

- -

C'est vous ?

C'est vous, enfant ?

- -

-S'il vous plaît.

Pouvez-vous lâcher vos cheveux ?

- -

(-Oui, Majesté.)

- -

-Hm.

- -

-Madame ?

Madame ?

Veuillez vous habiller, s'il vous plaît.

Tout de suite.

-Je veux mettre ma robe.

-Suivez-moi.

Avancez.

Veuillez patienter ici, Madame.

Sire ?

Voilà l'heure !

Musique solennelle

- -

Majesté…

Votre premier médecin !

Majesté…

les premières entrées.

La famille royale.

Majesté…

les grands officiers !

- -

Majesté…

votre toilette !

- -

Majesté…

les perruquiers.

- -

Mesdames et messieurs…

le lever du roi est terminé.

La famille royale peut disposer.

(-Oh, le Dauphin…)

-C'est tous les jours comme ça ?

-Les mêmes personnes qui répètent
les mêmes choses ?

-Oui.

Fermez les yeux.

-Hm…

-Ouvrez.

-J'ouvre ?

J'aimerais que vous restiez ici,

à Versailles.

-Je…

-Et vous ?

-Ah bah oui.

-À tout de suite.
-Oui.

-Ah.

Pardon.

-Qui sont tous ces gens

qui se préoccupent du roi ?

-Juste à côté du roi,
avec de l'embonpoint,

c'est Choiseul, le Premier ministre.

-Hm… Il transpire la méchanceté.

C'est vrai qu'il veut mettre sa sœur

dans le lit du roi ?

-Je ne sais pas, Madame.

-Vous le savez.

(Ah, le Dauphin.)

(Qu'il est beau…)

Et toutes ces dames, là-bas ?

-Ce sont les filles de Sa Majesté :

Adélaïde, Sophie, Victoire…

et celle qui a une bosse
à l'épaule gauche,

c'est Louise, la préférée du roi.

-Hm.

-On la surnomme "la dernière".

-Donne-moi du lard.

-Du lard !

-Du lard ?
-DU LARD !

-J'ai rarement vu des femmes
aussi étrangères à la séduction.

Et la reine, on ne la voit jamais ?

-C'est une femme discrète.

-Parce qu'elle souffre
des infidélités de son mari ?

Comme toutes les reines de France.

-Le roi aime sa discrétion.

Son humilité. Sa douceur.

-Toute la France le sait :

le roi n'a eu de cesse de la tromper.

Au château, puis au Parc-aux-Cerfs.

-La reine s'intéresse à ses enfants,
à la religion.

Elle a une méfiance démesurée
à l'égard du luxe

et de ceux
qui s'occupent mal de leur argent.

-Ouh là.
-Mettez votre capuche.

Vite ! Reculez-vous.

Il serait prudent de partir.
Cocher ?

-Allez ! Marchez !

Musique pieuse

-La reine, Marie Leszczynska,

s'éteignit après 43 ans
d'un règne discret et sans éclat.

Celui de Jeanne pouvait alors commencer.

Mais le deuil et les convenances
la cantonnaient hors de Versailles

dans un appartement tenu secret.

-Sire ?

Ce sont vos filles.
Elles savent que vous êtes là.

La robe.

Venez.

-Bonjour, mes filles.

-Père…

Une infâme rumeur court à Versailles.

-C'est si courant.
-Père…

On dit que vous passez toutes vos nuits
avec une…

-Mes chères filles,

il arrive à votre père…

parfois…

de voir une amie. C'est vrai.

Mais…

elle est mariée…
-Ah !

-Elle a un fils.

-Cette créature n'a aucun titre.

Elle n'est absolument pas mariée !

Et c'est son brocanteur qui a un fils.

Et elle est ignare.

-Je ne suis pas de votre avis.
-Nous sommes

la risée de Versailles
à cause de vos égarements.

-Notre mère vient juste de mourir.

Nous réclamons un peu de dignité.

-Cet entretien est terminé.

-Père ?

Je ne supporterai pas non plus

que vous l'établissiez
au rang de favorite durant le deuil.

-Et nous non plus.

-Sire…

Choiseul vient d'apprendre
l'origine de Jeanne.

Il ne va pas tolérer

que vous laissiez une fille des rues
côtoyer votre entourage.

-Cette jeune femme est…

mon entourage.

-Oui, sire.

-Je veux être auprès d'elle,

quand le soleil se lève

et quand le soleil se couche.

Voilà tout.

-Oui.

-Alors, vous savez
ce qu'il reste à faire.

Vite.

-Bien, sire.

Musique douce

-Pour être admise
officiellement à la Cour,

Jeanne ne pouvait rester
sans époux ni titre de noblesse.

Jean du Barry accepta volontiers
de jouer le marié

en échange
d'une coquette somme d'argent.

-Monsieur le comte du Barry,

consentez-vous à prendre pour épouse
Jeanne Bernier…

-Vaubernier.

-Jeanne Vaubernier ici présente ?

-Oui.

-Mademoiselle Jeanne Vaubernier,

acceptez-vous de prendre pour époux

Jean du Barry, ici présent ?

-Oui.

-Je vous déclare unis
par les liens du mariage.

-Adolphe,

les alliances.

Bah ? J'ai pas le droit
à un bisou de la mariée ?

-Et c'est ainsi que Jeanne
devint la comtesse du Barry.

-Grand Canal, Petit Canal,

Trianon, Bois des bosquets,
Carré des fleurs, Jardin français,

l'Orangerie…

et le château.
600 jets d'eau, 200000 arbres.

-Bravo.

Qui vit à la Cour
par ordre d'importance ?

-Domestiques, officiers,
courtisans, famille royale.

-À quelle heure
Sa Majesté traverse-t-elle

la galerie des Glaces
vers la chapelle ?

-Non !

C'est là que vous avez rencontré le roi,

Souvenez-vous.

-Et qu'il m'a rencontrée aussi.

-Effectivement.

-Je dirais à 9h trois quarts.

-Vous dites bien.
-La messe est à 10h.

-Voilà.

Le reste de la journée.

-11h, le Conseil des ministres,

13h, il dîne

dans sa chambre

avec une personne de sa famille ou seul.

Et l'après-midi
est consacré à la chasse.

Ou la sieste.

-Hm hm.

Le souper ?

-Le souper est à 18h,

quand il n'y a pas de soirée à l'Opéra.

Et quand les courtisans
sont invités à se servir,

c'est uniquement par petites quantités,

une fois que le serviteur a goûté

les quarante plats du roi.

-Oui.

Quelle est la signification
des gens assis ou debout ?

-Ducs et duchesses : assis.

Comte ou comtesse : debout.

-C'est bien. Vous avancez bien.

-Ils vont me regarder manger ?

-Oui.

Même debout,
c'est un privilège pour les courtisans.

Avançons. Nous allons travailler
les trois révérences d'adieu.

C'est le plus important, d'accord ?

Vous allez être jugée sévèrement
lors de votre présentation.

Je suis le roi. Regardez-moi.

Pas dans les yeux. Surtout…

ne regardez pas le roi dans les yeux.

Bien.

Qu'est-ce que je viens de dire ?

Baissez les yeux.

-Oui. Sinon ?

-Sinon…

ce serait perçu par la Cour
comme de l'arrogance,

de la fierté.

Ou, au contraire, comme une invitation.

-Une invitation ?
-Oui.

-À ?

-Eh bien…

Une invitation.

-À quoi ?
-Eh bien,

une invitation à…

Vous m'avez compris.

-Non.

-À ?
-À la bagatelle.

-Vous me faites rire.

J'ai le droit

de montrer ce sentiment ?

-On ne montre pas
ses sentiments à la Cour.

-Ah.

-Poursuivons.

Imaginez la traîne de votre robe.

Reculez au fond de la pièce.

Vous marchez dessus.

Faites votre avancée.
Je suis le roi de France.

Toute la Cour vous regarde.

Des nouvelles ?
-Je ne sais pas.

Eh bien.
-Elle ne va pas tarder.

-Le roi s'impatiente.
-Les jolies femmes

se font attendre, c'est bien connu.

-Puis-je avoir l'autorisation
de faire entrer

la comtesse du Barry ?

-Faites.

-La comtesse Jeanne…

du Barry !
-Ah !

-Enfin !

Musique douce

-Oh.….

-Pour qui se prend-elle ?
-C'est un scandale !

Mélodie douce au clavecin

-Mesdames et messieurs ?

Veuillez vous asseoir
pour le cadeau de Sa Majesté le roi

à Madame la Comtesse du Barry.

- -

-Il y a un cadeau ?

(-Regarde.)

-Mes jours et mes nuits
Ont bien peu de repos

Et beaucoup d'ennuis

Je me meurs de langueur

J'ai le feu dans le cœur

Je suis amoureux
Mais le ciel ne voit point

D'amant plus heureux

(-Oh, mon Dieu.)

(Merci.)

Comment t'appelles-tu ?
-Zamor.

(-Oh, comme c'est exotique.)

(Bienvenue.)

-Merci.

(-N'aie pas peur. N'aie pas peur.)

(Bienvenue, Zamor.)
-Merci.

(-Tu fais la révérence au roi ?)

(Tu fais la révérence au roi ?)

(-Regardez, quelle honte.)

Musique mélancolique

- -

- -

-Madame, vos appartements.

- -

Vous êtes ici chez vous.

- -

Jeanne,
je vous présente votre coiffeur,

votre maquilleur, vos valets,

votre intendante
et vos femmes de chambre.

Allez-y.

- -

Non, non…

Qu'est-ce que vous faites ?

- -

- -

-Forte de l'amour du roi,
Jeanne imposa à Versailles

son goût du naturel
et son amour des arts.

Ce dont profitèrent
bien des peintres et bien des poètes.

Elle n'ignorait pas qu'on cherchait
à marier lle Dauphin

et que, quelque part en Autriche,

une enfant de 11 ans
nommée Marie-Antoinette

attendait d'être mûre
pour lui être présentée.

Heureusement, c'était elle,

qui était, pour l'heure,
la première dame du château.

Mais pour combien de temps ?

Le roi pouvait à tout moment

lui préférer une des jeunes filles
du Parc-aux-Cerfs

et la congédier au moindre faux pas.

-Merveilleux.

- -

-Hm….

Quel mystère divin.

Quelque chose ne va pas, Madame ?

-Il n'y a que les étoiles
qui vous intéressent, Majesté.

-Vous me plaisez
quand vous êtes en colère.

-C'est faux.

Je vous plais tout le temps.

-Ça, c'est vrai.

Je vous aime, Madame.

-Non, Majesté, vous ne m'aimez pas.

Vous êtes excité
de ne pas me connaître.

-Mais je vous connais.

-Elle est habillée en homme !

-J'espère que vous vous souviendrez
de votre ami.

-Je ne suis pas la reine non plus.
-Pas encore.

Musique épique

-Lors sa première sortie officielle,

Jeanne s'afficha victorieusement
au bras du roi.

Pour la première fois
à la Cour de France,

une femme envoyait valser les usages,

les crinolines, les perruques poudrées

et s'habillait en homme.

-Tu es enfin arrivée
au rang que tu voulais,

mais je ne peux pas m'empêcher
d'avoir peur.

Et si le roi se lassait de toi ?
-C'est loin d'être le cas.

-Ne te montre pas orgueilleuse.
Ça peut te perdre.

(Enfin, Jeanne, le Parc-aux-Cerfs ?)

-Oui. Je sais. Il n'y va plus.

-Le parc existe toujours.
Ça veut dire ce que ça veut dire.

-Non, ça veut rien dire.

La Pompadour l'a créé
pour soulager sa concupiscence…

-Avec toi,

il n'a plus besoin
de se soulager ailleurs ?

-Exactement.

Pas comme certains.

-Si tu es si irrésistible,
pourquoi il t'épouse pas ?

-Parce que pour cela,
il faudrait annuler notre mariage.

Et le clergé s'y opposera.
Tu le sais.

-Son arrière-grand-père
a bien épousé sa maîtresse.

Je vois pas pourquoi
il ne le ferait pas.

-C'est pour Zamor
que je m'inquiète le plus.

Le pauvre n'a que moi.

-Il te faut de la pierre
et du patrimoine à ton nom.

Arrête de te préoccuper
du négrillon.

-Il s'appelle Zamor.

Musique douce

- -

- -

(-Merci.)

- -

-Louveciennes.

Jeanne disposait enfin
d'un endroit à elle,

où elle pouvait se retirer avec son roi
bien-aimé quand bon lui semblait

et où personne
ne pouvait lui dicter ses lois.

- -

-Ça me tire.

(-Fais un effort, Zamor.)

-Vous pouvez entrer.

-Asseyez-vous.

-D'où vient-il ?

-De Chandernagor... au Bengale.

-Hm. !l y a des nègres, en Inde ?

-Non, non.

Ce nègre vient d'Afrique.
-Ah !

-Mais il est passé par l'Inde.

Je pense même
qu'il a été vendu plusieurs fois.

Et… il vit désormais en France…

(-Je trouve que sa robe
est quand même assez jolie.)

-Elle a des rayures.

Elle s'est déguisée en rideaux.

-Désormais, il vit en France,

et j'en ai fait mon page.

-Allons, allons. Un page, c'est blanc.

Un page, c'est noble.
-Quoiqu'il ne soit

absolument pas nécessaire d'être noble

pour s'établir à la Cour.

N'est-ce pas ?

-N'est-ce pas ?

-J'en ai fait mon domestique.

-Vous voulez dire votre esclave ?
-Non.

-Il suffit de le regarder,
la nature l'a destiné à la servitude.

En Amérique, ce négrillon
cultiverait la canne.

Ici, il vous sert le thé
ou le chocolat, voilà tout.

Il ne faut rien attendre d'autre.

D'ailleurs, lui-même
est incapable d'attendre autre chose.

-Hm…

Il est capable, comme tout être
créé par Dieu, d'espérer le salut.

-Louise ?
-Hm hm ?

-Prétendrais-tu
me faire le catéchisme ?

-Ce négrillon ne me ressemble pas,

mais il est mon frère en Jésus Christ.
Et le tien aussi.

Et le vôtre aussi.

Et le vôtre.

-Oui, je suis d'accord.
-Elle est d'accord.

-Elle est d'accord !

-Veux-tu un biscuit ?

-Louise.

-Prends.

(-Il est noir,
mais sa langue est rose !)

(-J'ai pas vu.)

-Il est bon ?

-Ah oui, j'ai vu.
Une petite langue toute rose.

-Bien. Je dois prendre congé de vous.

Mes sœurs…

-Allons chanter.

-Reprenons la partition.

-Oui !

(-Allons, c'est fini.)

(C'est fini.)

(Elles sont méchantes, hein ?)

Musique dramatique

- -

- -

-Meurtrie par le scandale,
Louise quitta Versailles,

mettant fin à sa vie de princesse

et renonçant à ses privilèges
pour entrer dans les ordres.

- -

Le roi avait toujours eu
un faible pour la dernière,

et son départ le précipita
dans la mélancolie.

-Sire, c'est la comtesse du Barry.

-Bien.

-Veuillez me suivre.

-J'ai besoin d'être seul.

(-C'est…)

C'est le destin de Louise
qui vous angoisse ?

-Je dois travailler.

Mes hommages, Jeanne.

-Pardon ?

"Mes hommages" ?

-Oui.

Mes hommages.

-Qui était auprès du roi cette nuit ?

-C'était Madame de Brèche.

Elle vient souvent à Versailles,
son mari est musicien.

-Le roi a d'autres maîtresses ?

-Madame, vous êtes la favorite du roi.

Mais le roi a le goût du changement,

l'attrait de l'inconnu.

-Si je suis
en train de tomber en disgrâce,

je préfère que vous me le disiez
et je disparaîtrai.

-Vous êtes en train de découvrir
le côté sombre du roi.

Il faut savoir rester
digne et courageuse.

-Et moi je suis condamnée
à la fidélité ?

-Votre conduite doit être
au-dessus de tout soupçon.

La moindre faiblesse
sera rapportée au roi

et démesurément grossie par vos ennemis.

Musique douce

- -

-La Borde avait dit vrai :

Jeanne n'avait pas à s'inquiéter.

Elle restait toujours la favorite.

On se moquait de ses robes rayées
et de ses tenues masculines,

mais les femmes de la Cour
se mirent à l'imiter

avec le même empressement
qu'elles l'avaient calomniée.

-Regardez. Ça…

- -

C'est le style "du Barry".

- -

- -

- -

-Jeanne connut à Versailles
4 années de bonheur auprès du roi,

qui avait retrouvé peu à peu
le goût de vivre.

- -

Zamor avait grandi et, grâce à Jeanne,

il était devenu
un jeune homme délicat et érudit.

- -

Mais c'est à Adolphe,
désormais bien introduit à la Cour,

que Jeanne vouait
un amour sans retenue.

Soucieuse de son avenir,
elle préparait

son mariage
avec une fille de la haute bourgeoisie

dont il était tombé amoureux.

- -

-Ça suffit. Adolphe !

On arrête. On arrête.

-C'est de mieux en mieux…

Musique solennelle

-C'est l'annonce
d'une autre noce qui fit l'événement.

Le Dauphin, héritier du trône,

allait enfin épouser
la jeune Marie-Antoinette d'Autriche.

L'arrivée de la future reine,

minutieusement orchestrée par Choiseul,
mit la Cour en ébullition.

Jeanne était menacée.

-Regardez sa peau !

-Oh, mon Dieu, on dirait du lait.

Musique douce

- -

-Louis ?

Vous, euh…

Tu peux parler un peu allemand ?

- -

-Non.

-Mais je peux t'apprendre ?

- -

Peut-être plus tard ?

-Madame. La Dauphine a faim.

Pourriez-vous m'indiquer
quand elle sera servie ?

-Lorsque le Roi sera présent.

-Bien sûr. Oui.

Merci, Mercy.

-Sa Majesté, le roi,

et la comtesse du Barry.

Musique guillerette au clavecin

-Elle est en blanc.

(-Victoire ! Victoire !)

- -

-Oh!

-Elle a les cheveux lâchés !

- -

(Quelle horreur.…)

- -

-OH !

Musique douce

(-Comment ose-t-il ?)

- -

-Quelle est cette belle personne ?

-C'est une fille des rues.

C'est la créature à éliminer.

Et nous comptons tous sur vous
pour la répudier.

- -

-OH!

-Je sens
que je vais quitter cette table.

-Mais regardez ! Regardez !
-Je ne veux plus regarder.

C'est scandaleux

que le roi décide
de présenter la créature

à la Dauphine.

C'est indigne du roi très chrétien.

Il est clair pourtant
que nous célébrons ce soir

la fin de la créature.

-La Du Barry n'a d'affection

ni de haine pour personne.

Ce n'est pas avec ce caractère
que l'on peut gouverner.

-Cette jeune femme

a une particularité
que La Pompadour n'avait pas.

Elle est très portée sur la chose.

-Quelle chose ?

-Que nous avons entre les jambes.
-Oh.…

-Ma chère nièce,

vous devez utiliser votre influence
pour que cette misérable femme

soit chassée de la Cour.

-Plus vous ignorerez

la créature,
plus le royaume vous aimera.

-J'ai déjà dit à notre père

tout ce que le respect me permettait,

mais il est buté.

Peut-être que votre parole
aura plus de poids ?

Il vous aime déjà si fort.

-Moi aussi, je l'aime.
-Vous savez que la créature

n'a pas le droit de vous parler

tant que vous ne lui avez pas
adressé la parole la première.

Vous le savez, ça ?
Vous le savez ?

-Oui, dans ce cas-là,

je me déclare sa rivale.

Musique pieuse

- -

- -

- -

- -

- -

(-Merci.)

- -

(Merci, Majesté.)

-AMEN.

-Madame, Adolphe s'est battu en duel.
C'est grave.

Une voiture vous attend.

Musique dramatique

- -

- -

- -

-Jeanne ne se remit jamais
de la mort d'Adolphe,

ce fils chéri qu'elle n'avait pas porté.

Le confort et le luxe
lui semblaient insipides et futiles,

et elle comprit que la seule richesse
qui lui restait à Versailles,

c'était l'amour du roi.

- -

La future reine
ne lui avait toujours pas parlé.

Et ceci fragilisait sa position
aux yeux du royaume.

- -

- -

- -

- -

-Arrêtez, arrêtez.

- -

-Reprenons, reprenons.

-Alors.

- -

- -

-Ne vous laissez pas envahir
par leurs railleries.

- -

-Bien, Majesté.

Je vais déployer
ce qui est en mon pouvoir

pour ramener
Madame la Dauphine à la raison.

-Bien.

-La Dauphine
va vous adresser la parole demain,

à 16h au Salon de jeu.

Cela va se passer comme ceci :

je vous donnerai un signe de connivence,

un regard, une parole, un signal.

Là, la Dauphine s'arrêtera près de moi

et vous dira un mot,

l'air de rien.

Il ne faut pas s'attendre
à quelque chose de poignant,

car Madame la Dauphine tient à l'esprit…

"l'air de rien”.

(-Je comprends.)

(Ce sera parfait.)

(J'aurais adoré)

(qu'Adolphe soit là.)

Il aurait été
tellement heureux pour moi.

-Et.….

-À présent,

je vais demander à une personne
de nommer une carte.

Celle qui vous fait plaisir.

-Oui. Dame de pique.

-Dame de pique.

Et normalement.…

-OH!
-Une carte commence à monter.

Mesdames et messieurs,
qui n'est autre que…

la dame…

de pique.
Merci beaucoup !

Une carte, madame.

-As de cœur.

-Cœur, comme moi !

-Merci !

Merci infiniment !

Merci.

Musique douce

-C'est l'heure
de notre leçon de solfège.

-Le roi !

-Majesté, je…

Je….

-C'est l'union entre la France
et l'Autriche qui est en danger.

Vous devez

accepter : adressez un mot.

-Pauvre Mercy.

Il s'est donné tant de mal.

-Je trouve que Mercy a raison.

Et que vous avez tort, Adélaïde.

-Sophie ?

Sophie.

Quelle sotte !

Mélodie douce

- -

- -

-Majesté.

- -

Madame la Dauphine

souhaiterait inviter votre Majesté

à la représentation dans laquelle
elle tient le rôle d'une bergère.

-Hm.…. C'est charmant.

Une bergère…

-Est-ce que votre Majesté
nous fera l'honneur de sa présence ?

-Non.

- -

-Puis-je en connaître la raison ?

- -

-L'envie.

- -

-L'envie. Bien sûr.

L'envie.

Bien, Majesté.

Mes hommages.

-Il y a bien du monde,
aujourd'hui, à Versailles.

-Mais…

Majesté… pourquoi ?

Mais pourquoi ?
-Elle vous a parlé.

-Mais quelle idée ! Pourquoi ?

Musique joyeuse

-Elle court !
-Elle court !

- -

-Elle m'a parlé !

Elle m'a parlé !

(Elle m'a parlé !)
-Oui.

(Elle m'a parlé !)

-Elle est contente.

-Elle a l'air contente, oui.

Musique dramatique

- -

-Neuf mots tombés
de la bouche d'une princesse

avaient tiré Jeanne de sa disgrâce.

La famille royale daignait enfin
lui accorder sa considération.

- -

Le bonheur des amoureux
aurait pu durer,

mais malheureusement,

les astres,
que le roi aimait tant observer,

en avaient décidé autrement.

(-II faut faire la 3e saignée.)

-Jeanne.

Ils veulent faire la 3e saignée.

Oui ? Oui, sire ?

-Où est Jeanne ?

-Mais elle est là, sire. Jeanne ?

-Oui ?
-J'ai soif.

-Ah.…

-Non.

Je veux de l'eau de Vichy.

-De Vichy ?

Merci, Zamor.

-C'est la vérole.

(-Le roi est-il au courant ?)

(-Lui dire serait le tuer.)

(Vous êtes en danger, madame.)

(Si le roi vient à mourir,
la famille royale vous chassera.)

(Mettez vos affaires en ordre.)

(-Non.)

-C'est une simple récidive,
rien de grave.

-À 64 ans, la vérole, c'est grave.

-Oui. Il ne faut rien dire au roi.

-Je partage cet avis,
ça l'affaiblirait

davantage.

-Laissez-nous entrer.

-Madame.

La vérole est contagieuse.

-Je voudrais voir mon grand-père.

-J'ai pour ordre de vous protéger.

-C'est grotesque.

-Non.

C'est Versailles.

-Apportez-moi un miroir.

Apportez-moi un miroir !

Montrez-moi…

mon état.

Je voudrais…

me confesser.

-Sire,

pour prouver votre repentir,

il vous faut renoncer au scandale.

-J'ai peur de l'enfer, Jeanne.

Je me dois à Dieu
et à mon peuple.

Il faut que tu te retires.

Il faut que tu te retires.

Musique dramatique

Allumez la bougie.

-Félicité ?

-Madame ?
Vous pouvez regarder

si la bougie est toujours allumée ?

-Oui, elle l'est toujours.

(-Merci.)

(-Allez, au couvent !)

C'est tout ce qu'elle mérite.
(-Quel soulagement ! Elle part ?)

-Hm, bon débarras !

-Jeanne !

Jeanne !

-Non ! Elle revient.

La créature revient !
-La créature revient !

-Je voudrais lui dire
un dernier adieu.

-Non.

-Tut, tut ! Intervenez.

-Madame, l'adieu,
vous l'avez déjà fait.

-Laissez-la entrer.

-Bien, monseigneur.

-Je vous accompagne.

(-Je t'aime.)

-Enfin…

le tutoiement.

Moi aussi, je t'aime, Jeanne.

Tellement.

(Jeanne…)

(-Mon amour.…)

Musique triste

- -

Je vous remercie, monseigneur.

Vous avez toujours été bon avec moi.

- -

-Madame.

-Zamoyr, s'il te plaît. Ça va aller.

- -

À bientôt.
-À bientôt.

- -

(-Je vous absous de vos péchés,
mon fils.)

-Messieurs,
le roi me charge de vous dire

qu'il demande pardon à Dieu
de l'avoir offensé

et du scandale
qu'il a donné à son peuple.

Que si Dieu lui rend la santé,

il s'occupera de faire pénitence,

du soutien de la religion
et du soulagement de ses peuples.

-Prenez soin d'elle, La Borde.

-Oui. Oui, sire.

-Vous êtes mon ami, La Borde.

-Le roi est mort.

-Le roi est mort !
-Le roi est mort !

-Madame !

Musique dramatique

- -

- -

- -

-Le roi est mort !

- -

Vive le roi !

- -

-Je suis toute à vous.

Musique dramatique

- -

-Jeanne fut condamnée
pour ce qu'elle était

aux yeux de l'Église
et de la Monarchie :

le péché incarné.

On l'enferma un an dans un couvent

jusqu'à ce que le jeune Louis XVI
la libère

à la condition qu'elle ne s'approche
plus jamais de Versailles.

Jeanne retrouva
son pavillon de Louveciennes

et y vécut 15 années paisibles.

Mais la Révolution survint,

balayant les privilèges
de l'ancien monde

et redistribuant les cartes.

Les nobles cessèrent leurs querelles
dérisoires et, face à l'adversité,

Marie-Antoinette
offrit même son amitié à Jeanne.

Dans ces temps troublés,
chacun devait choisir son camp.

Zamor se rangea
du côté des Républicains

et par détresse ou par dépit,

dénonça lui-même
son ancienne maîtresse.

Qu'elle soit une fille du peuple
fut sans effet sur le jugement,

car aux yeux des citoyens,

Jeanne avait depuis longtemps
trahi son origine.

- -

Louis XVI fut guillotiné
le 21 janvier 1793,

Marie-Antoinette le 16 octobre,

et Jeanne le 8 décembre.

Sur l'échafaud, elle aurait prononcé
ces dernières paroles :

"Juste encore une minute,
monsieur le bourreau,

“j'ai trop aimé la vie
pour qu'on me l'enlève de cette façon."

Avant de lever les yeux
une dernière fois vers le ciel.

Musique mélancolique

Musique dramatique