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Noviembre

Alfredo.

Noviembre, c'�tait Alfredo.

Chaque fois que l'on me pose
cette question

je ne parviens pas � donner
une autre r�ponse.

Noviembre, c'�tait Alfredo.

Madrid, Septembre 1997

Salut, c'est bien ici l'audition?

-Oui. Tu es Imanol Astiarraga?
-Non, pourquoi?

Ils viennent de l'appeler.
Je pensais que c'�tait peut �tre toi.

Je crois que je passe � 17h,
mais je ne suis pas s�r.

Tu peux demander � la fille qui est l�.
Elle doit le savoir.

-Tu es tout seul ici?
-Non...

Je l'ai rencontr� dans le couloir
de l'�cole de th��tre.

Juste avant de passer les auditions.

Je m'en souviens tr�s bien,
car il m'a marqu�.

Il portait un sac � dos noir
sur le dos

d'o� sortait un phare
et une marionnette tr�s �trange.

Il avait un aspect assez bizarre.

-D'o� tu viens?
-Murcia.

Un p'tit village de Murcia
qui s'appelle Lorca.

-Et tu habites ici?
-Non, je suis juste venu passer l'audition.

Je lui ai dit qu'il pouvait rester
avec nous � la Nave.

La Nave c'est la maison
que vous occupez?

C'est pas une maison, c'est un
immeuble abandonn� depuis 15 ans.

-On pensait ouvrir une esp�ce de centre culturel.
-Et de loisirs.

Assistance sociale, atelier de peinture...
Un peu de tout.

La Nave �tait un immeuble abandonn�
qui se trouvait pr�s de Lavapies.

Il appartenait avant � une imprimerie.

Moi, Daniel, et le groupe,
nous l'avons occup� � partir de 1996.

Une ann�e avant qu'Alfredo
arrive � Madrid.

Attention. Je pr�f�re vous montrer.

Bon, on bouge les bras comme ceci.
Et avec �a

on bouge le cou
et avec �a, les yeux.

Et avec �a, la bouche.

O� tu l'as eu?

C'est moi qui l'ai fabriqu�e.

-Alfredo...
-Quoi?

Qu'est ce que regardent

ces fils de pute?

J'ai trouv� un endroit pour dormir
ce soir.

Dis moi, c'est comment Madrid?

Madrid?

C'est �norme, maman. C'est tr�s grand.

Comment va papa?

Plus ou moins bien.

Il va s'en remettre.
Embrasse le pour moi.

Et Alejandro aussi.

Tu as d�j� pass� l'audition?

Non, pas encore, je passe � 17h.

Bon, tu m'appelles d�s que t'as fini.

Quoi?

C'est plein de gens, maman.
Je ne t'entends pas bien.

-Appelle moi quand tu as termin�.
-Mais oui, ne t'inqui�tes pas.

Je n'ai plus de pi�ces, �a va couper, maman.
Je te rappelle si j'ai trouv� un endroit o� rester.

Maman..

Je vous aime, je vous aime beaucoup.
Je vous embrasse.

On t'aime aussi.

Il l'avait fabriqu� pour son fr�re
dans un atelier de marionnettes

� l'�poque o� il �tudiait le droit.
Elle s'appelait Aphrodite.

Il y �tait tr�s attach�.

Il disait toujours que s'il n'avait
pas fait cette marionnette pour son fr�re

il ne se serait jamais
consacr� au th��tre.

Ouais!

Ouais!

Putain.

Oui.

Tout, il laissa tout derri�re lui.

Famille, amis... La seule chose qui l'affectait,
qui le fit longtemps se sentir coupable,

c'est d'avoir laiss� Alejandro.
Mais il �tait absolument

ravi d'�tre � Madrid.

Avec Alicia, sous vivions � la Nave

et je lui ai propos� de venir
habiter avec nous.

Alfredo!

Alfredo!

Alfredo!

Mais si, tu peux.
Dis le moi, s'il te pla�t.

-Pourquoi faire? �a ne changerait rien.
-Mais si.

�a ne pas pas �tre si terrible.

Peut �tre que si tu me le disais, tu
comprendrais que ce n'est pas si horrible.

Ok, une fois.

-Une seule fois.
-Non, ce n'est pas assez.

-On roule un joint?
-Okay.

Dis le moi, Juan.
Tu dois me le dire.

Tu ne peux pas le garder au fond de toi.

Laisse le sortir mon amour.
Je vais rouler ce joint.

-En argentin.
-Non.

-P�ruvien.
-Non.

-Anglais.
-Pas question.

Japonais?

Tu r�ves.

Un autre joint?

Ok.

Vous pouvez nous aider?

-Tiens, Alfredo.
-Merci.

Ok, voila ce qu'on a gagn�.
Alfredo, c'est ta part.

Non, c'est pas n�cessaire.

-Allez, prend le.
-Non.

Gardez le pour vous.

L'autre jour non plus t'en as pas voulu.
Tu chipotes, prend le.

Je ne le fais pas pour �a.
J'en veux pas.

Je le fais parce que j'aime �a.
Pas pour cet argent de merde.

�a n'a rien � voir.
Je le fais aussi parce que �a me pla�t.

Encore mieux si on gagne
de l'argent, non? Prend.

Je ne veux pas cet argent, Dani.

Je ne le veux pas maintenant,
et jamais je n'en voudrais.

-Qu'est ce qui a? Tu me cherches?
-Paie le.

Il rigole.

Non, je ne blague pas.
Je ne veux vraiment pas de cet argent.

C'est si difficile � comprendre?

Donc tu le fais pour
l'amour de l'art?

Non, parce que je pense que
c'est le seul moyen de le faire.

Demander de l'argent � la fin,
�a veut dire que tu le vends.

Et si un jour on t'offre du boulot
en tant qu'acteur, tu vas faire quoi?

-Tu vas leur dire �a? Que �a te pla�t?
-Je ne veux pas travailler comme acteur, Dani.

Alors, qu'est ce que t'es venu foutre ici?

je te l'ai d�j� dit. Former une troupe de th��tre.
Et jouer gratuitement dans la rue.

C'est pour �a que je suis l�.

Dis le moi, Juan.
Tu dois me le dire.

Tu ne peux pas le garder au fond de toi.

Tu dois le laisser sortir, ch�ri.
Dis moi ce qui s'est pass�.

Raconte moi, s'il te pla�t.

Je ne peux pas.

Si, tu peux.

Si, tu peux.

Si, tu peux.

Cela ne peut pas �tre si terrible.
Peut �tre qu'en me le racontant, tu verras que...

Je ne peux pas.

Si...

Je ne peux pas.

Alfredo.

Y a t'il quelque chose qui
t'es arriv� dans la vie

et que tu n'oses pas raconter?

Pardon? Je n'ai pas bien entendu.

Quelque chose... d'inavouable.

Que tu n'as jamais os� raconter.

Je ne sais pas si j'ai quelque chose
d'inavouable. Je ne pense pas.

Nous avons tous un douloureux secret.

Toi aussi. J'en suis s�r.

Il y a quelque chose, mais je
ne pr�f�rerais ne pas m'en rappeler.

Ha oui? Raconte nous.

J'�tais petit quand c'est arriv�.

Ce n'est pas important. Continue.

Bon, les gens qui m'ont �lev�

ne sont pas mes parents biologiques.
J'ai �t� adopt�.

Continue.

Mes parents sont morts dans un accident
de voiture quand j'avais six ans.

Cela n'est pas quelque chose d'inavouable.

Je suppose que tes amis et les gens
qui t'entourent le savent, non?

Personne ne le sait.

C'est la premi�re fois que je le raconte.

Pourquoi?

Pourquoi je le dis maintenant?

Pourquoi tu le caches?

Je ne sais pas. Je l'ai toujours fait.

Je ne sais pas pourquoi je le cache,
mais je le fais tout le temps.

Quand on t'annon�a la mort de tes parents,
tu t'en souviens?

Tu ne t'en souviens pas.

Qu'est ce qui se passe, Alfredo?

Rien, je ne peux pas.

Si, tu peux.

Non, je ne peux pas

Si, tu peux.

Lucia... le texte.

Dis le moi, Juan.
Tu dois me le dire.

Tu ne peux pas le garder au fond de toi.

Tu dois le faire, ch�ri.

Tu dois le laisser sortir.

Je ne peux pas.

Maintenant j'y crois.

C'est ce que je veux dire.

Je ne peux pas m'exhiber
comme �a devant les gens.

Bon dieu, Dani.

Jongler est une chose,
mais r�citer des textes...

Tu as juste peur qu'on se moque de toi.

C'est rien pour toi?
Moi �a ne me fait pas rire.

C'est pas grave non?

Merde. Ils sont suppos�s rire
avec nous, pas rire de nous.

Bien, ne le fais pas.
C'est pas grave, mais bon.

Tu veux une autre bi�re?

Ok.

Je ne le ferai pas.

Paco.

Tu me donnes une autre bi�re,
s'il te pla�t?

-Voila
-Merci.

Je ne vais pas le faire.

Arr�te de faire chier, Dani.

Tout va aller bien,
il ne vas rien se passer. Ok?

Termin�.

Quoi?

-T'y �tais?
-O�?

Le jour o� tes parents sont morts.
T'y �tais, non?

-Pourquoi tu me demandes �a maintenant?
-Je ne sais pas.

J'y pensais,
et �a me paraissait super dur.

J'ai toujours pens� que
je n'�tais pas g�t� par la vie

mais pour d'autres, c'est pire.

Dani, je mentais.

Putain.

Tout �tait mensonge. Rien de ce
que j'ai racont� n'�tait vrai.

J'ai invent� jusqu'au dernier mot.

Merde.

Je te le jure.

Quoi?

Je ne le crois pas.

Quel fils de pute!

Excuse moi.

Tu es celui qui jouait la sc�ne
avec Lucia, non?

Oui, c'�tait moi.

F�licitation. Il y avait longtemps que
je n'avais pas vu quelque chose d'aussi bon.

Je voulais juste te le dire.

-Merci.
-Salut.

Bien s�r que j'en ai entendu parler.
L'�cole enti�re en parlait.

En quelques jours il est pass�
du pauvre orphelin au provocateur.

N'est-ce pas jouer la com�die que
de rendre cr�dible la fiction?

C'est ce qu'il fit.
Et de telle mani�re

qu'absolument tout le monde crut
qu'il racontait la v�rit�.

Bien s�r, parfaitement.

Je m'en rappelle parfaitement.
Je devais monter sur sc�ne pour jouer,

mais au lieu de me faire monter moi,
il lui demanda � lui.

Yuta �tait � cot� de la sc�ne.

Il appela Alfredo, qui paraissait

un peu perdu. Il monta sur la sc�ne
et s'assit sur un des cubes

qu'on utilisait comme d�cor.

Et Yuta lui dit...

Alfredo.

-Que fais tu ici?
-Quoi?

Oui, que fais tu ici?
A l'�cole?

Pourquoi es tu venu?

Moi?

�tudier.

�tudier quoi?

La com�die.

Pourquoi?

Comment �a, pourquoi?

Pourquoi le th��tre?

Tu dois bien avoir une raison.

Ou as tu choisi cela comme
tu aurais pu choisir

-l'informatique?
-Parce que c'est ce que j'aime.

Qu'est ce ce que tu aimes?

-Le th��tre. J'aime le th��tre.
-Oui.

Dis moi...

Selon toi, � quoi sert toute
cette histoire du th��tre?

Je ne sais pas.

Parfois � beaucoup de choses,
d'autres fois � rien.

Mais toi tu penses que �a devrait
servir � quelque chose?

Oui.

Au moins, pour s'am�liorer.

Nous rendre plus conscient,
je pense.

Tu ne veux rien am�liorer.

Quoi?

Tu m'as entendu.

Tu ne veux rien am�liorer chez toi.

Tu t'occupes d'autres choses.

Et c'est �a ton probl�me.

Qu'est-ce que vous voulez dire?

L'autre jour, tu m'as manqu� de respect.

A moi...

et � tous les autres.

Tu nous a menti � tous,
nous racontant ce film

sur ta vie. Regarde,

nous ne sommes pas tes marionnettes.

Les gens qui viennent ici s'impliquent.

Ils r�v�lent des choses horribles
sur eux m�me.

Des choses horribles.

Ils prennent des risques.

Mais pas toi.

Et en plus, tu veux te moquer de nous?

Tu n'es qu'une merde.

Tu ne respectes rien, ni personne.

Descend de cette sc�ne.

Descend.

Ce n'est pas vrai.

Ce n'est pas vrai?

Qu'est-ce qui n'est pas vrai?

Je ne voulais me moquer de personne.

Bien, moi je pense que si.
C'est la seule raison de ta venue ici.

Non.

Et pourquoi es-tu venu alors?

Tu vas r�pondre ou non?

Vous savez pourquoi je veux faire
du th��tre?

En r�alit�, je suis extr�mement
curieux de le savoir.

Je vais vous le dire.

Je veux faire du th��tre car je veux
faire quelque chose pour moi

et pour les autres.

Je veux faire du th��tre, parce que
je pense que cela sert pour communiquer

entre les humains,
qu'il peut �tre un chemin

nous permettant de mieux
nous comprendre.

C'est pour �a.

-Alors, tu veux changer le monde.
-Oui.

J'adorerais changer ce putain de monde.

Et je pense qu'il est encore temps.

Alfredo!

Alfredo...

Attend.

O� tu vas?

Je ne sais pas.
N'importe o� sauf ici,

�a c'est s�r.

Tu ne reviens pas?
Ils sont tous en train de t'attendre.

Non. Je m'en vais.

Ils vont te virer.

Je m'en fout. Je m'en fout.

D'accord.

Mais t'en vas pas comme �a.

-Tu vas � la maison?
-Oui.

Je rentre avec toi. J'arrive,
je vais prendre mes affaires.

Moi aussi, j'adorerais changer le monde.

J'adorerais changer ce putain de monde.

Je d�teste voir le public assis,

incapable de participer ou d'interagir.

Ils me font trop penser � lui. Ils peuvent
faire quelque chose, n'importe quoi.

Je ne supporte pas qu'ils restent
assis, comme des statues.

Je veux voir ce qu'on provoque.

Je ne sais pas quoi,
mais au moins quelque chose.

C'est �trange.

Quoi?

Je voulais faire du th��tre
pour tout le contraire.

Pourquoi?

Parce que je d�testais ma s�ur.

Je voulais �tre diff�rente d'elle.

Je voulais me sentir sp�ciale,
unique.

Quand on �tait petites,
elle faisait tout mieux que moi.

Mes parents disaient toujours qu'elle
�tait la plus jolie, la plus intelligente..

Et je la d�testais.

Je la d�testais de toute mon �me.

-Un jour, tu pourrais venir
avec Daniel et moi. -O�?

-Quand on joue dans la rue.
-Dans la rue?

-Pas possible, pas moi.
-Pourquoi pas?

Parce que non.

Dans la rue? Pas question.

Dans un th��tre, oui,
ou dans un film...

Voire � la TV, m�me si je trouve
que c'est de la merde.

Mais dans la rue?
Non.

Dans un th��tre oui,
mais pas dans la rue?

-C'est diff�rent.
-Pourquoi?

Parce que dans la rue, tu ne sais pas ce qui
peut se passer, comment peuvent r�agir les gens.

Dans un th��tre,
les gens viennent voir du th��tre.

Et tu sais plus ou moins
ce qui peut se passer.

C'est justement pour �a qu'on
le fait dans la rue!

Ce sont toujours les m�mes personnes
qui vont voir des pi�ces.

La seule fa�on d'atteindre tout
le monde, c'est d'aller dans la rue

leur raconter quelque chose.

Bon, je verrai.

Je vais abandonner les cours.

Quoi?

J'arr�te. Je ne vais pas revenir.

La table 10 � d�barrasser.
Ce type ne fait attention � rien.

Je te laisse les commandes de la 9 et
de la 10. Passe moi les plats de la 13.

C'est �a?

Trois caf�s,

un whisky, deux avec du cognac.

Sergio, il me faut l'escalope
et les p�tes pour la table 4.

Sergio, j'ai besoin des dessert pour
la 13. D�p�che toi, ils vont me tuer.

Merci.

Comment �a va, Alfredo?

T'es qui toi?

J'ai arr�t� peu de temps apr�s toi.
J'en pouvais plus. Toute cette

psycho-analyse.
Ils disaient que mon probl�me

c'est que je confondais l'�go et
l'estime de soi. Je suis parti.

Je ne pouvais pas supporter plus.

Ce n'�tait pas du th��tre, c'�tait comme
une sorte d'aide ou de th�rapie de groupe.

Tout sauf de la com�die.

C'�tait un asile d'ali�n�s.

Les gens se prenaient la t�te.

J'ai plus appris en deux mois dans la rue
qu'en deux ans dans cette putain d'�cole.

Pareil pour moi.

A ce sujet, depuis peu, Dani et moi
on a mont� un petit truc pour la rue.

C'est fou comment les gens r�agissent.

J'ai fait du th��tre � l'universit�.
Et �a n'a rien � voir.

J'adore tellement jouer dans la rue...
tu vas halluciner...

mais il y a des fois o� je bande.

-Non?
-S�rieux.

Dur comme une pierre.

Tu sais ce qui m'arrive � moi?

Quoi?

Merde, je sais pas si
je vais te le dire...

Dis moi.

Ok.

Avant de sortir dans rue, j'ai comme
des picotements dans le cul...

Putain.

Je te le jure.

C'est peut �tre � cause des nerfs.

Parce que c'est juste avant de sortir.
D�s que je suis dehors �a dispara�t.

Incroyable.

Il n'y avait aucun truc.
Bon, il y avait une chose.

J'avais un ami qui vivait
dans l'appartement du dessus.

Un mec qui s'appelait Pablo.

C'�tait �a le truc.
J'accrochais la chaise l� haut..

On est parti boire des coups.
On alla dans tous les bar du quartier.

A discuter du divin et des humains,
comme ils disent.

On a fini � 10h du matin,
dans un bar pr�s de Lavapies.

bourr�s comme des coings,

Ce fut le d�but d'une grande amiti�
et le d�but de tout le reste.

Pas seulement les premiers spectacles,

mais aussi, ce qui serait plus tard
la compagnie Noviembre.

"La chaude Dame""
Mai 1988

C'�tait miraculeux.
Cela fonctionnait vraiment.

Ce que nous faisions, et sa forme,
nous faisait nous sentir tr�s sp�ciaux.

Surtout le fait de ne rien
demander en �change.

Une chose impensable pendant ces ann�es
o� rien n'�tait gratuit.

Aucune explication n'�tait n�cessaire.

Ce sont les gens qui donnaient
l'explication.

Ils venaient avec des id�es bien plus
int�ressantes que les miennes.

La plupart des gens, quand ils nous
proposaient de l'argent et qu'on le refusait,

�taient surpris.
Ils ne comprenaient pas.

Nous faisions de petits sketchs

en g�n�ral d�pourvus de base �crite.

C'�tait des improvisations tr�s simples.

Des situations provocatrices
dont la cl�

�tait la spontan�it�.

J'�tais tr�s nerveuse la premi�re fois.

Je ne peux pas l'expliquer.
C'�tait si excitant...

Surtout juste avant d'y aller.

"Les Punks joyeux"
Juin 1998

Bonjour!

N'ayez pas peur.

H�, vous avez l'air effrayants.

Vous pensez qu'on va vous
demander de l'argent?

Qu'on va vous voler?
Vous demander la charit�?

Qu'on va vous agresser, non?

Et bien non!

Vous vous trompez vraiment.

Nous ne voulons pas d'argent!
L'argent nous d�goute.

Hein, les copains?

Nous sommes l� aujourd'hui

pour une cause plus humaine.

Beaucoup plus digne,

beaucoup plus d�nonciatrice,

beaucoup plus intelligente que l'argent!

Nous avons un cadeau pour vous tous.
C'est vrai!

Nous allons mettre fin � votre mis�re!

Et fin � votre souffrance!

Et fin � votre peine, baby!
Prenez �a!

Vous ne pouvez pas simplement
vous lever tous les matins

comme des zombies. Regardez vous!

Marchant endormis vers le m�me bureau...

Vous avez besoin d'un cadeau,
n'est ce pas?

Quelque chose de diff�rent,
quelque chose

pour �lever votre esprit,

pour vous sentir vivant,

vous faire sentir jeune de nouveau,

heureux,

chanceux,

libre.

C'est pour cela que nous sommes ici.

Pour vous apporter
quelque chose de pure

et de radicalement diff�rent
tous les matins

Let's go, punkies.

Cool.

We are the best.

Merde, encore!

Tu les lances comme une merde.

On a Lucia, Alicia, Helena...

Trois, c'est tout.

Et Imanol.

Vanessa, t'en penses quoi?

Il y a de l'argent?

Qu'est ce que tu veux dire?

Si on peut gagner quelque chose.

Pas un centime.

Non merci.

Comment peux tu �tre
si int�ress�e, conasse?

On ne va rien demander...

Le manifeste Noviembre?

Nous avions plusieurs principes.
Le premier, cr�er un th��tre libre,

ind�pendant et gratuit.

Le second, cr�er un th��tre en marge
des aides publiques et priv�es.

Ne pas jouer dans des locaux ferm�s

o� l'entr�e serait limit�e
et contr�l�e.

-Comment on va l'appeler?
-Noviembre.

-Comment?
-Noviembre.

Lucia, tu peux me passer l'eau?

On s'interdisait d'utiliser des
m�thodes �tablies d'interpr�tation.

Et pourquoi pas Octubre?
C'est beaucoup plus r�volutionnaire.

La r�volution Noviembre arrive apr�s.

Je r�ve de changer le monde...

C'est �a, Alfredito?

-Salope.
-Le cinqui�me commandement,

comme Alfredo le d�crivait,
�tait"la loi du terrorisme blanc",

c'�tait d'aller chercher le public
l� o� il se trouvait.

Ce fichu septi�me commandement!

Le septi�me commandement interdisait
l'entr�e de la troupe � toute personne

ayant eu un lien avec la TV ou le cin�ma.

Je ne me nourri pas du vent,
mon r�gime est une jolie chose.

Tu peux raconter ce que tu veux
sans argent

Je ne m'en souviens pas.
Je ne sais pas.

Je ne me rappelle pas d'un manifeste,
je le jure.

C'est la premi�re fois que j'en entends
parler. Quand j'ai rejoint le groupe...

Quoi? Tu vas nous prendre la t�te?

La cr�ation d'un mat�riel original,

avec l'interdiction d'adapter
des textes d�j� existants.

Et le dixi�me, et dernier:

promettre de ne pas trahir le manifeste.

Je ne veux pas apporter le malheur...

Je le jure, quand
j'ai rejoint le groupe

je n'ai sign� aucun manifeste.

Merde, je ne voulais
m�me pas �tre acteur.

La seule chose qu'ils m'ont demand� c'�tait
de pouvoir utiliser le fourgon de mon p�re et...

Il ont foutu un sacr� bordel avec.

Juan, on y va!

La r�volution est en marche,

je r�ve de changer le monde.

Allez, on y va!

-H�, attend Juan.
-Juan!

On a tout?

�chasses, poussettes, biberons,
ballons... Je crois que c'est bon.

C'est parti pour cette �uvre mal�fique!

Par l�!

L� bas!

Par l�!

"Les ch�rubins du diable"
Ao�t 1998

Que fais-tu l� haut?

Tu ne m'as pas demand� la permission

pour aller chez le marchand de glace.

Donne moi la permission, salope!

Reviens!

Ils vont nous offrir de la glace.
A la noix de coco.

Tu veux de la noix de coco?

La libert� d'improviser

a mis le feu � notre imagination.
Elle nous a donn�

une capacit� � faire n'importe quoi

impossible autrement.

O� est ta maman?
Tu l'as vu?

En haut?

D'habitude; c'est un ange.
Pas comme aujourd'hui.

En r�alit�, tout est
de la faute de sa m�re.

O� tu vas avec �a?!

Je vais te donner une fess�e!

C'est un vrai cirque.
Ils nous filent d'entre les mains.

Ces gosses sont impossibles!

Calme toi!

�a ne se fait pas.

Allez...

Monstres!

Dans vos poussettes!

Ils ne sont jamais comme �a.

-Regarde-les.
-Ils sont adorables.

Une mouche ts�-ts� a d� les piquer.

-�a les a refroidi, ma ch�rie
-Piqu�s par des mouches ts�-ts�.

Mime de Cordoba,
J'ai 4 enfants, aidez-moi SVP

Tu veux du feu?

Si t'as aim�, viens avec moi.

Je suis d�sol� mais je ne peux pas
vous laisser continuer.

Vous rangez tout �a.
D�tes-le � vos amis.

Vous n'avez pas le permis.

Satan!

Satan!

Satan!

-L�che-moi!
-Du calme.

Il ne faisait rien.

Laissez le partir!

Tout le monde se calme, merde!

Il vous faut une autorisation,
c'est tout.

-Une autorisation?
-S'il vous pla�t, on se calme.

Vous n'avez pas d'autorisation.

On se calme.

Qu'ils r�cup�rent leurs affaires
et que tout soit nickel.

D�gagez!

La prochaine fois,
demandez une autorisation.

Et dis � ton ami qu'on ne peut pas voler
la casquette d'un policier.

Sinon on va lui botter le cul.

Merde.

Combien de temps on va devoir attendre
avant de r�cup�rer le mat�riel?

Un mois environ.

Putain merde, �a fait chier.

Je le crois pas.

Tu peux le croire, petit ange.

Tu veux ma photo?

-Il me mate.
-Et alors?

-T'as un probl�me?
-Oui.

Arr�te de me regarder, merde!

Tais toi.

Et qu'est ce que tu regardes toi?

Toi, d�bile.

Par ici, Ramon.
Vous foutez encore le bordel?

Je n'ai rien fait.

Arr�te de faire le con et viens ici.

On nous a pr�t� la majorit� du mat�riel.

Je comprends tr�s bien,
mais je ne peux rien y faire.

Vous pouvez s�rement
faire quelque chose.

Si vous nous prenez tout

-vous nous d�pouillez
-Vous �tes d�j� nus.

Vous n'avez aucun droit.
Ce sont nos affaires.

Je te l'ai d�j� dit,
je peux rien faire, merde.

�coute.

Si je pouvez t'aider, je le ferais,
je te jure. Cela ne me d�range pas

que vous fassiez du th��tre dans la rue.
-Mais...?

Mais la loi c'est la loi.
Sans d'autorisation,

on ne peut pas faire de th��tre
sur la voie publique, ni ailleurs.

En plus, vous n'avez pas
de pi�ces d'identit�.

Dis moi ton nom.

Comment tu t'appelles?

Alfredo Baeza.

Avec un B.

Comment je vais dire � Eusebio

que ses �chasses sont bloqu�es
au commissariat pour un mois?

S'ils nous les rendent.
J'ai peur qu'on ne les revoie jamais.

Tu crois?

Ils ne peuvent pas faire �a.

-Comment tu peux savoir?
-Quel plaie.

Ce qui nous reste � faire,
c'est de payer l'amende.

Les b�tards. Ils n'ont aucun droit
� garder notre mat�riel.

Y'a pas moyen.

Je dois rendre les perruques
et les costumes � l'�cole.

C'est bon, c'est pas le plus important.

-Non, bien s�r.
-Et on fait quoi maintenant sans mat�riel?

On va se faire foutre.

Qu'est ce que tu veux qu'on fasse?

Bon, il n'y a rien de grave.
On va faire autre chose.

-Comme quoi?
-On va cr�er une autre histoire.

C'est s�r, on est tous
d'humeur cr�ative...

On doit pr�parer un nouveau spectacle.

-Et t'as des id�es?
-Des id�es?

J'ai la t�te remplie de putain d'id�es!
Je dois juste en choisir une.

Et donc...

On y va.

Bon, ma t�te � moi est
compl�tement vide.

Notre premier spectacle s'�tait
termin� au commissariat.

Et tout notre mat�riel
avait �t� confisqu�.

Comme vous pouvez l'imaginer,
ce n'est pas ce que nous avions pr�vu.

Nous avions pens� � tout.
Except�e cette foutue autorisation.

Le plus important �tait de sortir dans la rue,
faire des choses, quelqu'elles soient.

Ils voulaient la bagarre? Et bien
je vous assure qu'ils allaient l'avoir.

"Les oubli�s"
Novembre 1998

Noviembre est un groupe riche...

d'acteurs d�sesp�r�s.

Bien qu'ils n'aient pas un centime,

ils s'estiment...

tr�s...

oh, tr�s bien pay�s.

Aidez moi!

Aidez moi!

J'ai faim!

Qu'elle est jolie!

Je peux vous emprunter votre portable
pour appeler chez moi?

Vous avez un portable?

Vous en avez un?

Tiens, t'as qu'� appeler.

Merci.

Non, je suis comme toi.

Bonjour.
Vous avez un instant s'il vous pla�t?

D�gage!

-Me touche pas putain!
-Connard.

C'est toi le connard!

Nous devions vivre

dans la peau de chacun des personnages,

le plus r�ellement possible, et sur
la sc�ne que repr�sentait la rue.

Quand nous est venu l'id�e

de rompre avec les modes
d'interpr�tation habituels

et de jouer les personnages
de mani�re � voir

jusqu'� quel point ils �taient
cr�dibles dans la vie r�elle,

nous avons vraiment pris conscience
de jusqu'o� nous pouvions aller.

Alicia jouait cette toxico.

Lucia et Alfredo jouaient
la roumaine et le patriarche

comme il l'appelait.

Imanol �tait le sdf.

Helena et Pedro jouaient
la femme battue

et l'aveugle.
C'est l�,

que nous sommes pass�s,
d'un th��tre populaire et festif

� un th��tre plus social
et revendicatif.

C'�tait un th��tre plus fort,
plus agressif.

En r�alit� ce fut le d�but, m�me si nous
n'en �tions pas conscient sur le moment,

de ce que l'on allait appeler plus
tard le "th��tre documentaire".

Tous...

Et je m'en rendis compte plus tard...

Nous �tions devenu le reflet
du fr�re d'Alfredo.

Au fond, nous l'�tions tous.
Le reflet d'Alejandro.

Cette fois, vous ne pouvez pas dire
que vous ne demandiez pas d'argent.

Cela fait partie du r�le. Ce sont
des mendiants, ils demandent de l'argent.

Vas-y, assis toi.

-C'�tait dans le sc�nario, c'est �a?
-Oui.

Plus ou moins.

Tu es incroyable, gamin. Tu es capables
de faire tout �a pour gagner de l'argent

sans qu'on puisse
te reprocher quelque chose.

C'est incroyable.

Quoi?

-Que vous pensiez �a.
-Cela ne me surprendrait pas.

Vous ne pourriez vraiment pas jouer
dans une autre zone que celle-ci?

Non, c'est la meilleure.

On ne va pas aller le faire l�
o� il n'y a personne.

C'est s�r que ce serait difficile
de gagner autant de fric.

Arr�tez avec le fric! On ne le fait
pas pour l'argent! Vous savez

-ce que l'on va faire de cet argent?
-Ne me le dis pas. Donnez-le aux pauvres.

Comment vous le savez?

Allez.
Arr�te de me raconter des histoires.

Vous ne le croyez pas?

Non, je n'y crois pas.

De toute fa�on,

�a ne changera rien au final.

C'�tait quoi ton nom?

Alfredo Baeza.

-Avec un "B"...
-Je sais.

Vous allez faire quoi?

Comme d'habitude. Rentrer les donn�es,
et c'est tout.

Merci.

-Et le fauteuil roulant?
-Le mois prochain. Je ne peux rien y faire.

D'accord.

Vous pensez r�ellement donner
�a aux pauvres?

Je le jure sur Dieu.

Tu es plus malade que je ne le pensais.

C'�tait assez frustrant.

Comme un coup de poing.
Tous les efforts que nous avions fait

avaient disparu en un instant.
Je ressenti comme un grand vide.

Et surtout,
un profond sentiment d'impuissance.

Comment dire...
On s'est retrouv�s comme des cons.

Des �chasses, des couches, des matelas,
des draps, un microphone...

Et �a servirait � quoi?

Avec un peu d'argent

on pourrait rembourser
ce qu'on va d�penser.

Parce qu'ils nous ont pris
quatre torchons et deux �chasses,

on va commencer � demander de l'argent?

C'est la premi�re chose que nous
sommes interdit. Pas question.

Ce n'est pas que quelques chiffons
et �chasses. C'est beaucoup plus.

Tous les poussettes, les perruques, le
fauteuil, plein d'autres choses...

J'ai pas envie de compter,
�a ne me para�t pas important.

C'est s�r, rien n'�tait � toi.

Juan...

C'est la v�rit�.

On ne va pas se mettre � voir qui � donn�
et qui n'a pas donn�, gros malin.

Regarde un peu autour de toi.
J'ai pas envie d'en discuter.

Nous l'avons dit au d�but,
chacun donne ce qu'il peut.

Et que nous n'allions pas demander une
centime. Et si on ne respecte m�me pas �a

autant tout arr�ter.

Gagner de l'argent c'est une chose,
couvrir les d�penses en est une autre, Dani.

Si on commence comme �a, on finira comme les autres,
� faire du commercial dans un th��tre conventionn�.

Ce qui est le contraire ce que
nous �tions suppos�s faire.

Dani, personne n'a �voqu� �a.

Personne ne l'a dit,
mais �a commence toujours comme �a.

Vous savez ce que nous devrions faire?
Voler le mat�riel

-qu'on nous a pris.
-Aux flics? Mais oui, bien s�r.

Peut �tre pas � la police.
Mais il doit avoir un moyen.

Bon, si personne n'a de meilleure id�e,
je pense qu'il faut continuer comme avant.

-Juan, tu te souviens de Marbol?
-Oui, bien s�r.

Celui qui suivait aussi
les cours de th��tre

-� l'atelier? -Tu sais s'il travaille
toujours au Th��tre Royal?

S�rement, il �tait sous contrat.

Il disait qu'il en avait marre, mais
je crois qu'il y est toujours. Pourquoi?

Il avait dit qu'on pouvait l'appeler
si on avait besoin de lui un jour.

Et alors?

Avant de voler la police,
nous allons voler un th��tre national.

Tu mets combien de personne dedans?

Alors, il y a 700 fauteuils...

plus les balcons... 1.200.

Tu t'imagines jouer ici
avec le th��tre plein?

�a doit �tre �norme.

Je me pisserais dessus.
Je ne pourrais pas, je te jure.

Attendez, taisez-vous un moment.

-Pourquoi?
-Gardez le silence. Dani, ne bouge plus.

C'est hallucinant, non?

C'est bien, mais je pr�f�re la rue.

Marbol �tait le chef machiniste
du Th��tre Royal

et adorait le th��tre ind�pendant.

Il dirigeait un groupe appel� "les Puces",

qui joua dans diff�rents th��tres
de Madrid dans les ann�es 90.

Son boulot lui permettait de se consacrer
� sa troupe, mais il pensait bient�t le quitter.

Il nous raconta tous les secrets
du Th��tre Royal.

Comme les 5 millions de pesetas
initialement pr�vus,

alors que la construction du th��tre
en co�ta finalement 35.

Il d�testait leur politique.

Il disait que c'�tait un honte l'argent d�pens�
pour des pi�ces vues par trois pel�s et un tondu.

En nous montrant la salle des costumes,

ils nous dit que nous pouvions prendre
ce que l'on voulait.

Que finalement, c'est nous qui l'avions pay�s
et que l'on ne pouvait pas se voler � soi-m�me

Donc tout �a est � vous.

Je pr�f�re qu'ils vous servent plut�t
que les laisser moisir ici.

-On peut prendre ce qu'on veut?
-Bien s�r. Servez-vous.

�a aussi?

"Roi et Bourreau"
Avril 1999

"Guerre nucl�aire"
Mai 1999

"La putain de t�l�"
Juin 1999

"Les ann�es 60 sont � vous"
Juillet 1999

"Le repas"
Ao�t 1999

"Tinto de verano"
Septembre 1999

D�gage.

On s'en va?

Attend une seconde,
je veux voir quelque chose.

Pourquoi tu ris?

Je ne peux pas te le dire.

Pourquoi?

Parce que. Je te le dirai plus tard.
Regarde.

Allez, dis-moi.

Non, merde!

Sale con.

Imb�cile.

P�d�.

Salope.

Esp�ce de porc d�goutant. Je chie
sur tes anc�tres et nique ta m�re.

T'es qu'une sale pute.
J'esp�re que tu te feras violer

par un porc qui te laissera toute s�che

et toute infect�e de puces
et de morpions.

Suceur de merde.
J'esp�re qu'un psychopathe

violera ta m�re, ta femme
et tes enfants

sous tes yeux et les d�coupera
pour te les faire manger...

J'abandonne, t'as gagn�.

Je ne sais pas si c'est � cause
de ce que tu m'as dit,

mais je commence � me sentir pas bien.

C'est ta punition pour t'�tre comport� comme un con.
Et pour avoir gard� des choses pour toi

J'ai des vertiges.

C'est pas �tonnant. �a fait 3 heures
qu'on est l� � regarder des tableaux.

Je suis s�rieux.
Je me sens vraiment pas bien.

Vraiment?
Tu veux qu'on aille s'assoir?

Je vais m'�vanouir.

-Arr�te...
-Mais si.

Alfedo? Alfredo...

Quelqu'un peut m'aider?
Alfredo...

S'il vous pla�t!

-Excusez moi!
-Alfredo...

S'il vous pla�t!

-Vous m'entendez?
-Qui a t-il?

Une personne qui vient de s'�crouler.
Envoyez moi quelqu'un. Vite!

-Que s'est il pass�?
-Il m'a dit qu'il se sentait faible et il est tomb�.

Comme �a, d'un coup.

Alfredo...

Il ne bouge pas.

Alfredo...

Arr�te toi et �coute.

T'es toujours oblig� de pousser
les choses si loin.

J'aurais d� te laisser par terre.

�a n'a rien � voir avec toi. �a n'a rien
� voir avec la dispute. Arr�te toi

Je m'en fout. Laisse moi toute seule.

Lucia, je suis d�sol�. Excuse moi.
J'ai d�conn�.

Le "th��tre documentaire" est n�
au mus�e du Prado, par hasard.

C'est parti d'une blague d'Alfredo
devant le tableau des M�nines."

Et je fus la premi�re
� en souffir.

Alfredo ne savait pas encore
que j'�tais enceinte.

Tu m'as fait peur.
Je ne savais pas ce qui se passait.

C'est fini.

Au d�but, je pensais que
tu rigolais mais apr�s..

j'ai cru que c'�tait s�rieux.

Pendant une seconde,
je t'ai vu mourir.

"Attentat"
Novembre 1999

Aidez moi!
S'il vous pla�t, que quelqu'un m'aide!

"Attentat" fut la premi�re action
d'une s�rie de performances

que nous pensions faire � partir
de th�mes d'actualit�.

L'id�e �tait d'incorporer une part
de fiction dans la vie r�elle

et que les spectateur en fassent
partie de mani�re inconsciente.

Nous pensions ainsi aider les gens

� r�fl�chir sur des choses du moment,
comme le terrorisme.

S'il vous plait, tout le monde
reste l�. Par ici.

Revenez s'il vous pla�t.

Allez, par l�.

C'�tait vers 10h du matin.

Les magasins venaient d'ouvrir.

La rue n'�tait pas bond�e,
mais il y avait quand m�me du monde.

Putain.

D�sol�, je pouvais pas rester l�.

-Comme �a s'est pass�?
-Bien, � part cette poussette de merde.

-Quoi?
-Je l'ai renvers�e, je l'avais pas vu.

D'autres personnes durent �tre secourues.

Une vieille femme, on nous l'a dit
plus tard, s'�tait �vanouie

apr�s avoir vu Alfredo au sol.

Putain.

C'est pas tr�s joli.

Vous lui avez fait quoi.

On lui a mis une minerve, fait
un massage cardiaque...

On lui a pris le pouls.

S�rum et adr�naline.

Pr�pare le brancard.

-Attendez, attendez.
-Putain merde!

On est une troupe de th��tre.

Quoi?

Nous sommes une troupe de th��tre.
C'est un spectacle.

Quoi?

je suis d�sol�, mais nous n'avons
pas d'autre choix

que de vous mettre � la disposition
de la justice.

Le moment le plus dur

ne fut pas � la lecture du verdict,

mais quand le procureur lut les
accusations. Nous avons alors compris

que le jugement allait �tre beaucoup plus
compliqu� que ce que nous avions pr�vu.

Il ne nous accus�rent pas seulement de simulation
de crime, mais d'apologie du terrorisme.

On nous raconta plus tard

que le fait que ce fut pendant
l'ann�e de la tr�ve avec l'ETA.

les poussa a enterrer l'affaire

et � suspendre les condamnations.

Tout ce qui pouvait �tre
li� au terrorisme

�tait cach�.
Ils voulaient que la tr�ve

donne aux gens une impression
de calme et de paix.

Non, je n'ai jamais �t�
d'accord avec "Attentat".

La fin ne justifie jamais les moyens.

Je pensais que nous faisons une erreur.
Nous allions trop loin.

Ana est n�e le jour du verdict.

Je m'en souviens tr�s bien car nous
�tions en train de le f�ter � l'h�pital.

Alfredo, Lucia et la petite
sont partis vivre

dans un appartement � Chueca.

Daniel ne leur pardonna pas
d'�tre partis.

Il ne pouvait pas comprendre

pourquoi ils devaient s'en aller.

Nous avions pas tous la m�me opinion
sur ce qui venait de se passer,

et sur comment cela aller jouer
sur notre avenir.

L'interdiction de travailler sur
la voie public pendant 4 ans

ruina tous nos projets.

Je te l'ai d�j� dit, Daniel.
On ne peut rien faire.

Mais de quoi tu parles, le quoi?

Je te l'ai dit, non. Je ne vais
pas te l'expliquer une autre fois.

-Alfredo.
-J'arrive.

Parce que je suis au boulot
et que c'est le bordel.

Excuse moi.
Tu es Alfredo Baeza?

Oui.

Je ne savais pas que travaillais ici.

F�licitation. Je t'ai vu plusieurs
fois, c'est chouette ce que tu fais.

-Merci.
-Tu sais quand sera

la prochaine repr�sentation?

En v�rit�, je n'en ai aucune id�e.

Ok, je voulais juste te dire �a.

Cool. Merci.

Salut, Juan.

Tu es le seul � �tre contre.

Salut, Anita.

Vas y, je t'�coute.

Je t'ai d�j� tout dit.

Quoi?

Mais c'est toi qui
ne me laisse pas parler.

R�p�te.

Et pourquoi pas?

Parce que tu fais chier.
Pourquoi tu comprends pas?

Pense � ce qui se passerait...
Peut �tre que si je te dis...

Quoi?

Je le crois pas!

Non! Ni toi, ni moi, n'allons faire quelque
chose avant d'avoir ces autorisations!

J'en ai marre de parler avec toi.

-Merde!
-Tranquille.

Qu'est ce qui arrive � papa?

Comment �a va, Juan?

Qui c'�tait?
On t'entend de dehors.

-Daniel. Il dit qu'il va le faire tout seul.
-Et alors?

Laisse-le faire.

Qu'est ce que �a peut te faire?
S'il veut se mettre dans la merde...

Je veux juste qu'il ne nous mette
pas tous dans la merde.

Il a appel� toute la matin�e.
Je vais finir par l'envoyer chier.

Dani, arr�te de m'emmerder!
Va te faire foutre...

Excusez moi.

Je pensais que c'�tait un ami...

Oui, c'est moi.

Qui?

Oui. Non, pas de probl�me.
Je sais o� c'est.

Mardi � midi.

Je serai l�.

D'accord. Au revoir, Eduardo.

Tu connais un producteur de th��tre
qui s'appelle Eduardo Echevarria?

Et �a serait pour combien
de repr�sentations?

Pour l'instant, je ne peux pas dire.

Mais j'ai besoin que vous fassiez ce spectacle
dans le plus d'endroits possibles. Pourquoi?

Non, pour rien.

Je ne sais pas.

-Quoi? Il y a un probl�me?
-Non.

Je dois parler avec les autres du
groupe et voir pour les dates.

�coute,

�a peut te para�tre ridicule mais nous
n'avons jamais travailler comme professionnels.

�a serait la premi�re fois et...

Je ne sais pas si nous serons
capables de le faire.

Il n'y a pas grande diff�rence,
je t'assure. Et puis, vous pourrez

-faire ce que vous avez toujours fait.
-Et nous n'avons jamais demand� d'argent.

Je sais, mais essaye de comprendre. Je ne
peux pas faire autrement que vous payer.

Impossible de signer un contrat sans salaire.
Ne t'inqui�te pas, �a ne sera pas beaucoup.

Ne pense pas gagner des millions.
Le th��tre, �a paye des cacahu�tes.

C'est pas pour la quantit�.
Vraiment.

�a peut para�tre �trange,

mais c'est quelque chose sur lequel
on s'�tait mis d'accord depuis le d�but.

Que c'�tait mieux d'avancer librement,
de ne pas nous professionnaliser. Alors...

�coute, r�fl�chis-y

Tu n'es pas oblig�
de r�pondre maintenant.

J'en parle aux autres,
et je t'appelle.

-Salut.
-Salut.

-Elle s'est endormie?
-Oui, tout juste.

-Qu'est ce qu'il t'a dit?
-Rien.

Il veut nous embaucher pour faire
du th��tre dans des festivals.

Il a dit que nous pouvions faire
ce que l'on voulait.

Jouer des spectacles qu'on a d�j� fait.
Ou cr�er quelque chose de nouveau.

Et �a serait pour quand?

On commencerait au festival d'Alcala.
En juillet, je crois.

Tu lui as dit quoi?

Que j'allais en parler aux autres.
Mais de toute fa�on, je pense dire non.

Quoi?

Tu ne dis rien?

Tu as tout dit.

Je suis d�sol�.
T'en penses quoi?

-Tu veux vraiment le savoir?
-Oui, dis-moi.

Que �a pourrait �tre chouette de rejouer tous ensemble.
Et qu'avec le jugement, il n'y a pas d'autre moyen.

Et que ce n'est pas si grave si on joue
avec un statut de professionnels.

Et qu'avant de d�cider, tu devrais
consulter les autres.

Ils ont le droit de savoir.

Mais je ne veux pas le faire. On ne l'a
jamais fait, on ne va pas commencer maintenant.

-Faire quoi?
-�tre pay� pour le faire, Lucia.

Je pense que tu veux le faire,
m�me si t'affirmes le contraire.

C'est pas la question.

Si.

�a serait bien que pour une fois,
tu ne fasses pas les choses

selon ta t�te,
mais selon �a.

Je ne dis pas �a, putain.

C'est toi qui le dis.

Mais tu dis que, de toute fa�on,
tu le feras.

Oui, j'en ai envie. Et alors?
De toute fa�on, c'est la seule fa�on.

Moi je pense que non.

-Bien, dis nous comment.
-Je te l'ai d�j� expliqu�.

C'est beaucoup trop risqu�.

Allez, Dani, merde.
Personne ici ne veut

aller jouer dans la rue, d�fier le jugement
et risquer de finir en t�le comme des cons.

-Je pr�f�re �a, plut�t que de me faire niquer.
-Je pense pareil.

Bien, mais les autres non.

Je sais tr�s bien ce que vous pensez.
Je le vois.

Mais �a me para�t �norme
que du jour au lendemain,

on change compl�tement nos mani�res de
faire. C'est une question de principes.

Il n'est pas question de principes, Dani.
Juste de pouvoir faire du th��tre pendant 8 mois.

�a ne te para�t pas une question de principes.
A moi, si. C'est tout ce que j'ai � dire.

Personne ne t'oblige.
Si �a ne te pla�t pas, ne le fais pas.

Je sais. Mais ne t'inqui�tes pas, nous serons l�.
Je ne vais pas te faire ce plaisir.

Je me fout de que tu fais.

-Qu'est ce qui se passe?
-je peux dire quelque chose?

Vas y.

Pourquoi on ne fait pas ce qu'a dit Helena?
�a me para�t le mieux.

En continuant comme �a,
on n'arrivera nulle part.

J'�tais pour.

Non.

J'ai dit oui parce que �a me
paraissait le plus raisonnable.

J'ai dit non.

Que je suivrais la majorit�.

Je suivrai la majorit�.

Oui.

Oui.

"Messies"
Juillet 2000

Tu veux le sang du Christ?

Toi? Tu en veux?

Tu veux le sang du Christ?

Dani!

Putain, qu'est ce que tu fout?

Ce qu'on a toujours fait,
c'est �a que je fait.

-T'es con.
-Vas te faire foutre.

-Tu vas tout foutre en l'air.
-Ha oui? J'esp�re bien!

Non, Dani!

-Tu veux du sang?
-Fais gaffe, connard!

Me pousses pas.

Vas te faire foutre!

Dani!

Merde, Dani!

Stop!

Dani!

Mon�Dieu, pourquoi nous fais �a?

C'est le seul moyen que je vois.
�a sera peut �tre pr�t � temps.

Oui.

Et pour quand devrons nous avoir
�crit le texte?

Le convocation est pour octobre.
Si c'est pr�t pour septembre,

j'aurai le temps d'envoyer les papiers
au minist�re de la Culture.

-Vous pensez que c'est possible?
-Je crois que oui.

J'ai un autre projet que je ne peux pas abandonner,
c'est la seule chose que je peux faire pour le moment.

Vous ne pourriez pas essayer
de les convaincre?

Non, j'ai essay� toute la matin�e.
Ce serait stupide d'insister.

Je te laisse. Pr�parez tout �a.
Et pense � ce que je t'ai dit.

Si tu veux continuer de jouer.

Je ne peux pas continuer � travailler avec
des gens comme �a. �a complique tout.

Mais j'aimerais continuer avec vous.
Je ne vais pas tout g�cher pour un fou.

Tu ne me vires pas, connard.
C'est moi qui m'en vais.

Laisse tomber Dani.
On va discuter dehors.

Laisse moi tranquille, y'a aucun probl�me.
Tous ces engagements, tous ces manifestes,

tout ce th��tre gratuit,
et maintenant?

Tu n'es qu'un putain de vendu.

Tu t'es vendu pour des cacahu�tes.

Et toi, gros malin? T'as tout g�ch�.
Et pire, c'est que c'est �a que tu voulait.

Bien s�r que je le voulais.
Et je le referai.

Tu sais pourquoi? Parce qu'on
ne peut pas affirmer une chose

et faire le contraire.

Le mieux que tu peux faire, c'est de t'en aller, Dani.
On a plus rien � se dire, tu me l'a d�j� dit.

T'as bien chang�.

Oui, Dani, j'ai chang�. Et alors?

Il y a des gens qui �voluent,

et d'autres qui restent les m�mes toute
leur putain de vie. Comme toi.

Bien s�r que je reste le m�me,
et je ne pense pas changer!

Ta gueule, Dani.

M�me quand je serai en train de mourir, je continuerai
� �tre le m�me et � penser la m�me chose.

Laisse moi, merde!

On s'en va.

Qu'est ce qu'il y a?

Les spectacles sont annul�s.

Merde.

Salut.

�a ne vous d�rangerait pas de faire une
photo avec moi et mes coll�gues?

On a l'habitude de prendre une photo
avec les gens

qui jouent au festival.

Si �a ne vous d�range pas.

La derni�re fois que nous nous
sommes retrouv�s tous ensemble,

ce fut � Alcala,
et ce fut tr�s triste.

C'est tr�s dur d'accepter la rupture
de quelque chose

que tu as cr��.

Non seulement que tu as cr��, mais pour lequel tu
as v�cu. Car nous vivions pour nulle autre chose.

Le jour o� nous avons sign� notre premier
contrat avec Eduardo Echevarria,

nous avons sign�
notre sentence de mort.

Nous perdions la seule chose qui nous
rendait diff�rents et nous maintenait unis:

la libert� et le d�sir de faire
quelque chose d'unique.

En envoyant valser tout �a,
et en faisant comme les autres,

nous perdions notre raison d'�tre.

Daniel avait raison.

Nous nous �tions vendus.
Eduardo voulait seulement essayer

d'exploiter le scandale de "Attentat".

Ce n'�tait ni une question de temps,
ni une question de fatigue.

C'�tait simplement

son extr�misme et sa radicalit�.

Il tenait un discours qui n'�tait plus
partag� par beaucoup d'entre nous.

Et que m�me si ce n'�tait pas grand
chose, cela devenait invivable.

Nous nous sommes vendus. Non
seulement en acceptant de l'argent

pour la premi�re fois depuis
la formation du groupe,

mais aussi... pour la quantit�...

Oui, cela a �t� tr�s douloureux. La
quantit� de choses que nous avons du changer.

Je vous donne un exemple.
Chaque fois que nous jouions "Messies",

on le faisait � poil. Jusqu'�
l'arriv�e de ce vertueux d'Eduardo.

Ce connard nous fit porter

des pagnes et des bustiers.
Merde! En 1999!

Non, apr�s avoir quitt� le groupe,
Daniel et moi

n'avons plu eu aucun contact
avec les autres.

Il y a juste Pedro, qui est venu
nous voir une fois � la Nave.

Il nous raconta qu'Alfredo jouait
dans des bars � Malasana.

Mais nous ne le voyions plus...
jusqu'� ce qui arriva � Alejandro.

Je suis s�r que c'�tait
li� � son fr�re.

Ecoutez. Tout ce que faisait Alfredo
�tait directement li� � son fr�re.

Il �tait tourment� par un r�ve
qui se r�p�tait:

il r�vait qu'il
assassinait son fr�re.

Alfredo confondait la fiction et la r�alit�, et
pensait parfois que cela s'�tait vraiment pass� .

Alfredo!

Alfredo!

Qu'est ce qui a?

Je t'appelle et...
J'arrive du minist�re.

Et?

Ils ne nous donnent pas de subvention.
Ouvre moi.

-Salut.
-Salut.

T'es rentr� quand?

Je viens d'arriv�.

J'adore la regarder dormir.

Moi aussi.

J'ai du enlever mon t-shirt
et me laver les mains.

Pourquoi?

Parce que je me d�goute.

�a me d�goute de la toucher apr�s avoir
pass� la soir�e dans ce bar de merde.

Je ne vais pas continuer.

Je suis en train de pourrir.
Je n'en peux plus.

Ne le fais pas.

Je ne veux plus rien faire
qui ait � voir avec �a.

Rien, m�me de th��tre.

C'est de la merde.

Alfredo?

Quoi?

Qu'est ce qu'il y a?

Alejandro est tomb� malade.

Chaque fois qu'on lui en donnait une,
elle finissait en morceaux.

J'essayais de l'en emp�cher, mais...

C'est bon, maman.

Tu m'as manqu�.

Tu veux que je te pr�pare quelque chose � manger,
ou tu pr�f�res te reposer apr�s le voyage?

Non rien, merci.
Je vais m'allonger un peu.

Bon, je te laisse tranquille.

-Je vais aider ton p�re.
-A plus tard, maman.

A tout � l'heure, fiston.

Pourquoi t'as fait �a?

T'en es s�r?

Je n'ai plus envie
de faire de th��tre.

�a peut changer. Je ne sais pas,
les choses peuvent �voluer,

peut �tre que tu auras plus
de chance dans quelques ann�es.

Je ne crois pas.

R�fl�chis bien.

Tu as toujours aim� �a.
Il y a pire comme activit�.

Ha oui? Ce n'est pas ce que tu disais
quand je suis parti � Madrid.

Oui.

Mais j'y ai r�fl�chi apr�s.
Ton fr�re m'y a aid�, je pense.

Tes marionnettes sont les seules
choses qu'il n'ait jamais aim�.

C'est fou.

Quoi?

Rien.

-Qu'est ce qui a?
-Non, rien.

Je ne savais pas qu'elles
avaient tant d'importance.

Personne ne sut ce qu'il
se passa � Lorca,

mais il avait du s'y passer quelque chose d'important,
car il nous � tous appel� pour reformer la troupe

Beaucoup de choses se sont dites,
mais personne ne sait vraiment.

Alejandro.

Salut. Tu as vu qui est venu
te rendre visite?

Il �tait compl�tement excit�.

Il voulait tout recommencer.

Il me raconta son id�e du Th��tre Royal,
�a me paraissait une folie,

mais je compris plus tard qu'il s'agissait
de revenir � ce que nous avions toujours �t�

Allo, Daniel est l�?

Dani, c'est moi, Alfredo.

Alfredo Baeza.

�a ne me paraissait pas �tre
une mauvaise id�e.

Le jugement nous interdisait de jouer
sur la voie publique.

Mais ne disait rien sur le th��tre.

L'id�e du Manifeste ne
m'int�ressait pas vraiment.

J'avais dit non parce que �a me
paraissait tr�s risqu�.

Et que je ne le pensais pas
n�cessaire, � ce moment l�.

"Attentat" m'avait paru suffisant.

J'ai dit non simplement car je ne
voulais pas avoir de probl�mes.

"Donc, vous d�fendez une id�e sur le papier,
mais vous �tes incapables de la d�fendre

et d'en faire une r�alit�.
C'est �a?"...

Il me l'a dit comme �a, avec cette
mani�re qu'il avait de dire les choses...

Qu'il m'a convaincu.
Je n'ai pas pu refuser.

"Th��tre Royal"
Septembre 2001

-C'est bon.
-Ok, j'y vais.

Vas � ton fauteuil, ne t'arr�tes
jamais, ne parles � personne.

Ok, � plus tard.

Dani? Dani?!

Juan, c'est toi?

-Oui, c'est moi.
-Je suis l�.

Pourquoi t'as mis tout ce temps?

-Je n'ai pas vu Pedro.
-Merde.

On est � la bourre.
Je te fais un truc rapidement.

-Attend Dani. Faut qu'on arr�te tout.
-Quoi?

-Faut qu'on pr�vienne Alfredo.
-Qu'est-ce qui se passe?

Chut.

Qu'est-ce qui se passe?

Qu'est-ce qui se passe?

-Devine qui vient de rentrer dans le th��tre.
-Qui?

-Rien que ce putain de Pr�sident.
-Je vais pr�venir Alfredo...

Attend une seconde.

-Tu en es s�r?
-Je l'ai vu rentrer.

-Le Pr�sident?
-Je te jure Dani, on doit le dire � Alfredo

Attend. Pourquoi?

Comment �a, pourquoi?
Pour lui dire ce qui se passe!

-Si tu lui dis, �a va le rendre plus nerveux.
-Normal!

Non, c'est mieux qu'il ne le sache pas.

T'es fou? Tu sais pas ce qui peut
se passer avec tout ce monde!

Putain, tant mieux!

Plus il y a du monde, mieux c'est.

T'es malade.

Je vais le pr�venir.

-Attend.
-Laisse moi.

-Tu ne vas pr�venir personne.
-Laisse moi, Dani.

Juan.

Viens, on va voir comment on va faire.

Ok, les enfants. Bonne chance!
On y va.

Que le spectacle commence.

Salut!

Excusez moi,
pouvez-vous couper la musique

un instant?
Si �a ne vous d�range pas.

Coupez cette musique!

Merci, tr�s aimable.

R�pond, Alberto.

Oui, dis moi?

Pardonnez cette petite interruption,

de cette belle production,
subventionn�e par notre illustre

Minist�re de la Culture. Mais...

J'ai une chose � vous raconter,

si �a ne vous d�range pas.

Alors...

nous avons d�cid� de prendre cette
sc�ne par la force, pour...

que nos voix soient entendues.

Et donc, un...

deux...

trois...

et quatre.

Nous avons fait cela car
nous en avons marre.

Oui.

Nous sommes fatigu�s.

Nous sommes d�gout�s.

Nous sommes d�sesp�r�s!

Je pr�viens les acteurs.

Car nous voyons que le th��tre,
et l'art en g�n�ral...

empeste...

vraiment!

Baisse le rideau.

Tout � fait.

�a pue les affaires, �a pue
les conseils d'administration,

les fonctionnaires, le commerce,

la publicit�, la routine,
le confort...

la b�tise, l'ennui, la bureaucratie
et la trahison du th��tre.

Tout sauf l'art!

L'art!

L'art est mort.

Il ne reste que le business de l'art...

le march� de l'art...

ou la n�gociation des
subventions de l'art.

Juste un autre compte en banque,

l'art d'ajouter des nombres.

Mais nous n'en faisons pas parti...

Qu'est-ce qu'il fait?

Il continue de se balancer.

Incroyable.

Nous sommes... liiiiiibre!

On pourrait passer par le second pont,

mais c'est trop �loign�.

Il y a un autre moyen de monter?

Excusez moi,
personne ne peut passer.

Oui!

Nous croyons en un art capable
de changer le c�ur des gens...

De leur donner de la force...

Ne me touche pas.
Je vais sortir.

L'art peut les aider
� se sentir vivant.

L'art...

atteint directement
l'esprit de chaque homme,

et de chaque femme.
L'art permet de prendre conscience,

il nous rend meilleur.

L'art est universel...

Il est sans fronti�res...

sans religion,

sans race.

L'art peut �tre une arme.

Pas une arme symbolique.

Une arme r�elle.

-Une arme qui veut se faire entendre...
-Fils de pute!

Et qui ne veut pas rater sa cible.

Alfredo?

Alfredo...

Alfredo!

Alfredo!

Si j'avais la possibilit�
de revenir 20 ans en arri�re,

Je referais la m�me chose.

Mais en ayant appris de nos erreurs.
Et alors, nous ne pourrions pas �chouer.

Je ne sais pas.
Chaque fois que j'y pense,

�a me para�t...

ridicule.

Le temps a pass�...

Et �a me semble douloureux et ridicule.
Mais surtout, inutile.

Inutile.

Je n'oublierai jamais l'image
d'Alfredo pendu au trap�ze.

Jamais.

Nous ne pouvions pas y croire.

Aujourd'hui encore, j'ai du mal
� croire qu'Alfredo soit mort.

C'�tait un mauvais r�ve.
Un cauchemar.

Vous ne pouvez imaginer combien
quelque chose comme �a

peut changer la vie d'une personne.

Depuis ce jour l�,
je ne suis plus la m�me.

Je vous assure, qu'il n'y a pas
un seul jour de mon existence

o� je ne pense pas � cet instant.

Nous voulions changer le monde,
et nous avons �chou�.

Aujourd'hui, j'essaye de faire
que le monde de me change pas.

L'art est une arme
charg�e d'avenir

A mon p�re